
Joseph Pulitzer, créateur du prix prestigieux qui porte son nom, a dit un jour “Catapultes et noix de coco”.
Non. En fait, il a dit “Écrivez court et vous serez lu, écrivez clairement et vous serez compris, écrivez imagé et vous marquerez les mémoires”, mais je me suis emmêlée les pinceaux avec un copier/coller, et je ne pouvais pas corriger, c’était bien trop beau comme phrase d’accroche.
A cause de ça, on repassera pour le “écrivez court”. Déjà, ça commence bien.
L’année dernière, après Motocultor, j’ai un peu craqué et pondu un reportage que je considère encore comme une sorte de Chapelle Sixtine. Si tu ne l’as pas lu, il est là. Pas de pression hein, c’est pas Game of Thrones ici (quoique…), tu comprendras quand même si tu as loupé l’épisode précédent.
Autant dire que j’ai la maxi pression pour raconter l’édition 2019 du Motocultor. Parce que j’y suis retournée, BIEN ENTENDU. Et cette fois, je n’étais pas seule. Pour “écrire imagé”, j’ai deux bottes secrètes. La première, ce sont les caupaings Seb & Aurélia qui se sont chargés des illustrations. La seconde, c’est le challenge. L’an dernier, on l’a fait façon RDV en Terre Inconnue, une bien belle émission de TF1 dont je n’avais vu qu’un seul épisode (Fred Michalak chez les Lolos Noirs, histoire d’allier mes deux autres passions, soit le rugby et le malaise). Cette année, pour le Motoc’ des survivants, je pensais à raconter le festival comme une saison de Koh Lanta. C’était sans compter un esprit tordu qui restera anonyme pour ne pas lui jeter l’opprobre (coucou Romain !), et qui m’a mise au défi de m’embarquer dans une thématique “Moundir et les Apprentis Aventuriers”.
Je ne suis pas femme à reculer devant les provocations. Dont acte.
On va rigoler. Ou souffrir, je ne sais pas.
D’autant que contrairement à l’année dernière, je n’ai pas la moindre idée de ce qui se passe dans cette émission de télépoubelle.
Remercions donc Wikipedia, qui m’a appris qu’en gros, c’est une sorte de Koh Lanta avec moins de budget, en plus petit comité mais avec autant d’emmerdes.
Changeons néanmoins légèrement les règles du jeu. Si l’an dernier, le rôle du présentateur/fil rouge était clairement attribué à Abbath, cette année, il faudra déterminer QUI est un peu le Moundir du Motoc. Le Motocundir.
Outre un présentateur charismatique, on trouve aussi une foultitude d’épreuves plus ou moins éliminatoires, et plus ou moins liées à la survie, à l’adresse, l’habileté, la force mentale et/ou physique, et la capacité stratégique des candidats. Enfin, vite fait hein.
JEUDI – JOUR 1 – EXCALIBUR ET COMPAGNIE
On a perdu pas mal de temps à expliquer le principe du jeu. Un peu comme Moundir quand il explique les épreuves à une assistance constituée à 85% de faux-cils et pectoraux épilés.
Sauf qu’avant d’y parvenir, il ne faut pas oublier que ce qui compte, c’est le voyage, pas la destination. Enfin, si, la destination, ce sont les concerts et le festival lui-même, donc ça compte, mais surtout, ça se mérite.
L’an dernier, nous étions entrés comme dans du beurre (salé, Bretagne oblige), à une heure légèrement plus tardive. MAIS l’an dernier, c’était avant l’une des innovations de 2019, soit “la journée du jeudi”, invitant nombre de festivaliers à débarquer dans le Morbihan sur un même créneau horaire.
Épreuve éliminatoire : (Un indice s’affiche sur votre écran)
Ceci n’est PAS la file pour tenter sa chance et sortir l’épée du rocher (Photo : Aurélia Léardini)
La première épreuve qui s’impose est donc un exercice de patience, consistant à attendre sagement dans des files interminables qui s’étendent loin, très loin, d’abord la pose des bracelets, puis l’entrée dans le camping avec la fouille des sacs qui l’accompagne.
Les stratégies des candidats sont diverses, mais la meilleure semble être celle des groupes qui se relaient, certains patientant pour le camping pendant que leurs camarades passent aux bracelets. L’épreuve est pimentée par l’impératif de se débarrasser de tout contenant en verre, bouteilles comprises, avant le passage du portail. Malin, mais pas inévitable, car le candidat-festivalier ne se laisse pas impressionner et attaque l’apéro en transvasant les liquides dans son bide. Sécurité assurée sans bris de verre.
Épreuve subsidiaire :
Un jeu de survie ne porterait pas justement son nom sans obstacle entre les participants et LA BOUFFE. Cet obstacle mythologique, connu comme “Le Supplice de Tantale”, consiste à essayer de comprendre pourquoi le camion à frites et pizzas garé sur le camping n’ouvre qu’à des horaires surréalistes (type entre minuit et 3 heures du matin). Plus tard, sur le site du festival, les aventuriers font face à une pénurie de frites.
Mais surtout, il faut qu’on parle d’un truc. Cette année, pas de Correff aux débits de boisson du festival. Elle est là, l’épreuve. Et la perplexité ultime, alors qu’on nous vend depuis des mois une journée spéciale “Excalibur” avec village médiévalo-gaulois, la bière du même nom, véritable potion magique l’an dernier n’est pas à la carte.
Admettons, admettons. On s’était dit que la fonction brasserie reviendrait probablement à la Dillettante toute proche, qui organisait son pti Off de l’autre côté de Kerboulard, mais hormis au bar VIP, la seule bière dispo, c’était…
De la 8-6.
#Perplexe
#UnPeuDèg’
S’agit-t-il du moment de l’émission où les candidats réalisent qu’ils vont devoir vivre sans crème hydratante, maquillage de contouring, chasses d’eau et shakes de protéines ?
S’agit-t-il d’une mise à l’épreuve ? Une privation destinée à encourager le drama ?
Peut-être.
Est-ce que ça aura été efficace ? Peut-être. Faute de drama, j’ai préféré m’imposer une épreuve supplémentaire, celle de parvenir à passer tout le festival sans en boire une goutte. Risquant crise de foie et diabète foudroyant à force de boire du cidre, il est important de tenir bon pour ses convictions en ce bas monde.
Le parcours pour rejoindre la zone du festival étant semé d’embûches (essentiellement : la file d’attente pour l’entrée, celle pour les toilettes centrales, les toilettes périphériques encore fermées, la bagarre avec les tentes récalcitrantes qu’il faut prendre soin de bien monter puisque la météo s’annonce compliquée, et surtout, les voisins EXTRÊMEMENT sympathiques et leurs glacières bien remplies), il revient à Aurélia et Seb, fort efficaces et énergiques, de documenter la soirée côté groupes.
Côté scène, c’est Corvus Corax qui a eu le privilège d’ouvrir la soirée. Parce que les Allemands aussi ont le droit de porter des kilts et jouer du folk médiéval.
(Galerie : Sébastien Gallon)
Puis Stille Volk, pour le coup, des Français (Occitans, même !) au nom allemand. La mondialisation a vraiment eu des conséquences bizarres sur Le Monde.
(Galerie : Aurélia Léardini & Sébastien Gallon)
En “vedette américaine” (c’est comme ça qu’on appelait Sylvie Vartan quand elle ouvrait pour les Beatles), rien de moins qu’Alan Stivell, harpiste star de la seconde moitié du 20e siècle, du renouveau des bagadoù, de la musique et de la langue bretonne. Ce qui n’est pas si mal, pour un gars né dans le Puy-de-Dôme. La légende ne dit pas si les chanteurs de Manau étaient dans le public. Et comme le disait un ami : “Alan Stivell ? Il existe encore ? Nan, parce que je me souviens, quand j’étais petit, il était déjà vieux.”
(Galerie : Aurélia Léardini & Sébastien Gallon)
L’attraction essentielle de la soirée étant à venir, sous la forme d’EXCALIBUR, un show unique pour le 20e anniversaire de la formation, suivi d’une sorte de “prequel”, totalisant trois heures pour cet opéra-rock celtique.
Soyons honnêtes. Bien que présenté comme un moment absolument mythique, je n’avais strictement jamais entendu parler de ce spectacle. Mais il ne faut pas mourir bête, et, comme tu le comprendras dans l’Episode 2, on pensait clairement mourir pendant le Motocultor. Dans un regain de curiosité, accompagné d’un râle de motivation, je me suis donc traînée jusqu’à la Dave Mustage.
(Galerie : Sébastien Gallon)
Restons honnêtes : ça ne m’a pas plu. On en a reparlé avec les autres plus tard, et le verdict était le même : c’était chiant. Pourtant, clairement, les moyens étaient là. Une scène immense, un décor à la limite de l’overkill, des musiciens dans tous les sens, des figurants, une réplique de l’épée Excalibur dans un coin, ou un bagad entier. Mais difficile de rentrer dans l’histoire ou même dans l’ambiance, quand on peine un peu à comprendre ce qu’il se passe. On comprend bien que sur scène, se côtoient Supertramp, Dan Ar Braz et Jethro Tull, mais c’est compliqué de les identifier. S’en suit un moment extrêmement gênant où Alan Simon, créateur du show, explique avoir été jusqu’en Australie pour trouver la bonne interprète pour un rôle précis : “il fallait qu’elle soit très, très belle”. OK. Écoute, c’est vrai que ce n’est pas forcément le critère principal pour choisir une chanteuse, mais pourquoi pas. Résultat, une jeune fille blonde débarque sur scène… Et va se planquer derrière une harpe dont elle joue aussi. Et une partie du spectacle ressemble un peu à ce tableau : des gens qui se suivent, débarquent pour un morceau, puis disparaissent. Côté public, tout est plutôt mou. Une théorie revient parmi nous :
Heureusement, comme chez Moundir, le Motocultor planque une “Ile de la dernière chance”, soit la scène du camping. L’an dernier, elle s’appelait “Hyper U”, mais en 2019, c’est un nouveau monde, c’est un nouveau départ, c’est une nouvelle structure et un nouveau nom. C’est la scène “Prosono Discount” où Murder One et Sideburn jouaient dès le début de soirée. Pour être passée à côté en rejoignant Excalibur, les paroles de TOUS les groupes du camping sonnaient invariablement comme un amoncellement de “FERME TA GUEULE, FERME TA GUEUUUUUULE, FERME TA FERME TA GUEULE (etc)”. Plutôt prometteur.
Notons néanmoins que le fait d’être partagés entre la Dave Mustage et la Prosono Discount a donné des échanges de textos surréalistes, de type
Excalibur, on dirait un peu du Epica tendance 4e album. Et y’a une danseuse. Dire que demain matin, on va voir du grindcore sur la même scène…
– Alors que nous, on a The Bearded Bastards !
Moundir aurait validé. Avec accès direct en finale pour Mars Red Sky, venus se chauffer sur la scène du camping en fin de soirée avant d’ouvrir officiellement les hostilités du vendredi côté festival. Et tant mieux. Parce que sur une scène toute petite, avec des effets lumières et projections tout à fait respectables, ça restait une ambiance décontractée et un peu crade. Idéal, donc pour clôturer les concerts du camping, présents uniquement le jeudi soir.
Fuyant la mise en place du Macumba pour se réfugier à Eluveitie, on constate que les Suisses jouent toujours des instruments au nom imprononçable. Pas mon truc non plus, mais dynamiques et communicatifs, malgré l’heure tardive et le retard général dû à Excalibur.
(Galerie : Aurélia Léardini & Sébastien Gallon)
Et ainsi s’achève la première journée, riche en contenu télépoubellesque ainsi qu’en sensations fortes. Suite de la saga dans l’Episode 2 !
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