
Deux heures avant leur passage sur la scène du Cernunnos Pagan Fest, les Mexicains de Cemican nous accordent une interview. A l’heure dite, toujours personne… Les Aztèques prennent leur temps et à leur arrivée, la surprise est de taille ! Bardés d’os et de plumes, ils sont impressionnants dans leur costume de scène ! L’émotion passée, place au bla bla.
Avertissement : les membres du groupe parlaient un anglais limité et la difficulté d’enregistrer correctement un si grand nombre d’intervenants a complexifié la retranscription de l’interview.
– Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?
Ocelot : Cemican est un groupe qui mélange le metal aux cultures préhispaniques du Mexique. Nous utilisons de nombreux instruments autochtones qui viennent compléter la guitare, la basse, la batterie. Nous incluons dans nos concerts des danses chamaniques et de petits rituels. Vous verrez ça tout à l’heure !
– Comment créez-vous vos costumes et vos peintures ?
Tlipoca : Nous nous sommes inspirés des différents dieux aztèques.
Ocelot : Nous avons essayé de combiner l’ancien et le moderne. Les Aztèques n’avaient pas de bottes ou je ne sais quoi d’autre ! Nous souhaitons faire connaître aux gens notre Histoire à travers des créations modernes. C’est très important à nos yeux. Nous proposons nos idées à un costumier qui réalise nos tenues.
– C’est votre première venue au Cernunnos ; comment trouvez-vous l’ambiance ?
Ocelot : C’est très différent des festivals dont on a l’habitude. C’est la première fois que nous participons à un festival dédié au pagan. Ici les gens ont des costumes ; c’est plus chaleureux et convivial.
– En Europe, les cultures ressuscitées par le metal ont toutes disparu il y a longtemps. Les langues amérindiennes sont toujours pratiquées de nos jours en Amérique centrale, tout comme certaines traditions.
Tlipoca : Le chaman qui nous accompagne chante en nahuatl. Il connaît de nombreux mythes et nous est d’un grand secours
Xaman-ek : Certaines communautés parlent encore la langue de nos ancêtres.
Ocelot : Nous nous considérons étrangers à la culture chrétienne du Mexique. Nous essayons de la laisser de côté pour faire revivre nos anciennes cultures. Beaucoup de Mexicains sont encore catholiques mais nous tentons de faire revivre les anciens dieux comme Quetzalcoatl ou Tezcatlipoca dans nos chansons. Les gens sont fiers qu’un groupe fasse connaître cette part de notre histoire à l’étranger.
– L’environnement et la nature sont des thèmes chers aux groupes européens. Partagez-vous ce sentiment au Mexique ?
Ocelot : Ce n’est pas un aspect que nous abordons directement dans nos chansons même s’il peut être présent de manière sous-jacente. Nous nous intéressons surtout à la culture pour la faire vivre au public de toutes les manières possibles, à travers la musique, les danses, etc. Notre énergie sur scène est très particulière parce que nous avons un visuel très fort ; parfois nous faisons brûler du copal [sorte d’ambre ; signifie “encens” en nahuatl, NDLR]. L’expérience sur scène est totale.
– Vous jouez de différents instruments à vents : quelles sources avez-vous utilisées et comment les avez-vous fabriqués ?
Ocelot : Parfois nous essayons un instrument pour connaître la manière dont il sonne. Ensuite nous ajoutons le reste des instruments. Quand nous avons déjà des riffs de guitare, Mazatecpatl essaie différents instruments pour trouver celui qui y collera le mieux. En plus des sifflets nous avons des trompes mayas, des gousses de flamboyant, des fruits à coques… Nous avons dans le groupe un archéologue, un professeur, un ethnomusicologue. Mazatecpatl a voyagé dans tout le Mexique pour découvrir des instruments. Il a rencontré des Mayas qui lui vendu ou offert des instruments. Nous avons aussi des répliques d’instruments anciens exposés dans des musées. Nous les avons refabriqués pour essayer de découvrir comment les utiliser. Il n’y pas d’écrit ou de partition datant de l’époque aztèque.
– Vous avez une approche plutôt expérimentale alors ?
Ocelot : Yei Tochtli étudie la musique. Il a participé à des fouilles sur des sites archéologiques et a découvert des fragments d’instruments dont il a créé des répliques. Nous utilisons aussi des instruments d’autres pays comme le Pérou, l’Australie, la Bolivie. Ils se marient bien à notre musique.
– Pourquoi avez-vous décidé de chanter en nahuatl et comment avez-vous appris cette langue ?
Xaman-ek : Nous n’oublions pas nos origines, nos racines…
Ocelot : Nous voulons faire revivre tout ce qui a pu être oublié. La mondialisation est très forte au Mexique et nous voulons rappeler tout cela aux gens.
– Vous utilisez l’espagnol dans vos chanson : vous n’avez pas de revendication particulière vis-à-vis de la colonisation ?
Ocelet : Nous mélangeons l’espagnol et le nahuatl. Tout le monde parle en espagnol au Mexique. Notre but n’était pas de nous adresser exclusivement aux Mexicains. Jouer à travers l’Europe était un de nos buts. Nous avions besoin de la reconnaissances du public européen.
– Etes-vous déjà allé jouer en Espagne ?
Ocelot : Oui, nous y avons joué l’an dernier. Nous avons joué en France, en Belgique, aux Pays-Bas et en Allemagne au Wacken. Les premières fois, les gens ne comprenaient pas trop notre musique mais à la fin des concerts ils dansaient toujours ou organisaient des mosh-pits.
Merci encore à Cemican pour leur temps et à Sarah de Dooweet pour avoir préparé cette rencontre !
Propos recueillis par Thomas et Fable.
Photo : Fable
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