Interview avec Flèche Love

Une chronique un peu particulière aujourd’hui : César est allé à la rencontre de Flèche Love, artiste musicienne, chanteuse et productrice, engagée et passionnée de tatouage . On a décidé d’en savoir un peu plus sur son univers si particulier, teinté d’électro et de soul, au sens premier, fait avec l’âme de sa créatrice, créature puissante, un peu sorcière et conteuse.

 

Ton premier album solo Naga part1 sort le 1er mars, comment as-tu travaillé sur ce projet?

FL: Eh bien, j’ai fait ce que j’avais envie de faire, je me suis octroyée une liberté absolue : par exemple le dernier morceau que j’ai sorti “Festa Tocandira” fait cinq minutes, il est en espagnol, en anglais, un peu de portugais et une impro de deux minutes cinquante, donc le format n’est pas traditionnel. Dans le précédent morceau “Umusuna”, il n’y a pas de refrain, cette liberté est un luxe en fait.

 

Tu as produit ce disque seule ?

FL: Je l’ai réalisé toute seule, mais je suis sur un label indépendant qui s’appelle Musique Sauvage. On est peu d’artiste, il y a Dick Annegarn, Buridane, Lior Shoov, donc des gens un peu chelous dans leurs vibes (rire) et du coup ils ont l’habitude de laisser de la liberté aux artistes de créer.

 

Il y a quelque chose qui marque tout de suite quand on t’écoute, c’est ta voix. Tu pars aussi bien dans les aiguës que dans les graves, en passant du rap au lyrique. Est-ce que c’est quelque chose que tu travailles en écrivant ou bien ça te vient quand tu chantes ?

FL: Je considère vraiment la voix comme un muscle et comme un terrain d’expérimentation. Par exemple, j’ai fait du baroque et là je reprend des cours de lyrique. J’aimerais bien faire du Growl dans le style métal ; ça m’intéresse vachement  (rire), et ça me plait de travailler la voix. Mais quand j’écris une chanson je ne me dis pas là, c’est le moment rap ou, là, ce serait bien en lyrique, ça sors comme ça. Après il y a des morceaux où il n’y a pas vraiment de rap, et d’autres où c’est que lyrique et ça fait partie du processus de liberté

 

Tu parlais de la voix comme un muscle, est-ce que quand tu chantes, tu ressens dans le corps un lâcher prise ? Je pense au morceau “Festa Tocandira” où la fin s’approche d’une forme de transe.

FL: C’est intéressant ce que tu dis… mais c’est paradoxal ! A la fois quand je me sens bien, j’arrive à chanter et être dans le lâcher-prise, et quand je suis à la télé ou à la radio, je vais m’écouter me juger et être plus en retenu. Mais tu vois ces envolés dont tu parles sur “Festa” ça me permet de partir beaucoup plus et cette partie en fait c’est une impro. Quand c’est en impro tu lâches plus et vu que j’enregistre souvent chez moi seule c’est plus évident, même si on l’a refait en studio je suis repartie en impro total. Je cherche cette idée de transe parce que je ne suis pas dans le lâcher prise dans la vie.

 

Ce duel se ressent dans tes morceaux notamment “Umusuna”, où la manière dont tu chantes la première phrase donne l’impression que tu dis “il était une fois”. Tu amènes une histoire qui se développe et dont l’énergie varie.

FL: Ah ça me fait plaisir ce que tu dis, parce que j’adore la poésie, les haïkus, le fait de dérouler tout un paysage en deux phrases, tout un imaginaire. Je trouve ça puissant et pour moi la chanson te permet en deux à cinq minutes de créer également un paysage, et ça me fait plaisir que tu le ressentes parce que tu ne te rends jamais compte comment les gens vont recevoir ce que tu fais.

Tu crées un paysage également visuel, notamment avec les photos de Roberto Greco avec qui tu travailles et qui réalise tes clips. On sent que vous vous êtes trouvés tous les deux. Comment vous êtes-vous rencontrés?

FL: Je le connais depuis dix ans c’est un très bon ami de ma grande sœur : ils étaient à l’ECAL (Ecole Cantonnale d’Art de Lausanne,ndlr) et lui il était en photo. En fait, il y a dix ans je me rappelle j’avais un blog et il avait fait une séance photo pour moi et m’avait dit  “j’aimerais que pour ton premier album ce soit moi qui fasse ta pochette” . Ce que je trouve intéressant dans son imagerie à lui, c’est qu’il ne travaille pas avec tout le monde, il n’en a pas envie. Souvent dans la musique c’est en cercle fermé on voit toujours les mêmes. Et moi je trouve son travail exceptionnel, son travail de la lumière est fou.

On écris les clips ensemble et après il les réalise, je fais confiance à sa vision et lui à la mienne. Et surtout, le jour du clip j’ai pas envie de me poser de questions, juste d’être porté. On se complète énormément : lui c’est un technicien moi je suis plus dans l’imagination. Si j’ai une idée il sait tout de suite me dire comment la faire, si c’est faisable ou pas donc c’est parfait . C’est très important pour moi car je pense très vite aux clips, je trouve ça génial, ça offre une espèce de tri dimension, tu n’es pas que dans l’expérience sonore.

Et puis il y a une super équipe avec Roberto Greco. On n’a pas beaucoup de budget mais cette contrainte nous demande d’être encore plus créatif et je trouve ça génial.

 

Cet album s’appelle Naga Part1 j’imagine qu’une deuxième partie est prévu?

FL: Oui normalement en octobre, je travaille dessus. Il y a déjà des morceaux que je vais jouer en live qui sont de la deuxième partie.

 

 

Retrouvez la deuxième partie la semaine prochaine dans la catégorie tatouage car on a poursuivi cette rencontre de manière presque philosophique sur son rapport aux tatouages, aux regards, aux corps, au monde.

Propos recueillis par César

Crédit photo: Roberto Greco

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