
Mike Scheidt est un survivant, a touché la mort de près et ce genre d’expérience marquante qui ne peut qu’apporter une autre dimension à sa propre création, à la réflexion et tout ce qui entoure son art. C’est en novembre 2016 lorsque Mike Scheidt se voit diagnostiquer une infection des intestins qui était prête a lui donner le coup fatal. Après de longues semaines d’hospitalisation, de dures épreuves et douleurs et des mois de repos physique, Yob a vécu tout les stades aux portes de la fin, suspendu à l’état de santé de son leader. Vaincre la mort et une chose, se nourrir de ce qu’on a vécu est une autre. Yob est une catharsis perpétuelle, un instant de répit dans l’orage. Mike Scheidt ne pouvait s’en arrêter là et Our Raw Heart vit le jour en juin dernier.
Ce 8ème album est une expérience à part, de par son contexte et son passé. 4 ans après le magnifique Clearing the Path to Ascend. On nous laissait là avec un disque qui se concluait sur un émouvant “Marrow” et il était difficile de s’attendre à ce qui allait se passer. La musique de Yob est en perpétuel mouvement, étroitement liée à son leader, son créateur Mike Scheidt. Qui crée au grès de ses hauts et ses bas, s’en nourrit, les transforme en lumière et bouleverse, les disques ont toujours portés ce quelque chose à rebrousse poil des genres et du reste, rendant difficile le rapide et facile catalogage. Yob a rarement laissé indifférent. Est ce vécu comme une thérapie, un besoin ou une catharsis de l’art de Mike Scheidt. Tout un peu à la fois avec ce 8eme opus studio au titre tout en symbole A Raw Heart avec au premier abord une pochette mystique et magnifique qui jette le premier indice sur ce qui se dévoile.
Ce cœur brut n’est pas une thérapie mais un cri, celui de la vie. « Ablaze » ouvre en explosant au visage de l’auditeur. Des envolées lyrique comme une bouffée d’oxygène, celle du survivant. Cette album est celui du jour d’après, après se relever de cette douleur. « The Screen » à la recherche d’un Morbid Angel, un doom rigueux au riff lourd et rampant qui ne bougera pas pendant 10 minutes, comme une menace au dessus de nos têtes, une tension se rappelant à chaque instant qu’elle est là. L’homme est marqué, la convalescence est difficile et la musique est réellement sa catharsis.
Difficile et puissant, l’album est l’aube après les ténèbres. La porte est grande ouverte aux émotions et même si la mélancolie toujours présente, il n’est plus question de ténèbres et de torture d l’âme. Le Mike Scheidt d’aujourd’hui cherche à voir la vie autrement et sa musique suit son inspiration créative. le Yob sombre et torturé laisse plus de place à la lumière. Bousculé et bouleversé, l’auditeur s’élève avec Scheidt. La souffrance doit laisser sa place et au fil des titres comme “In Reverie” ou “Beauty In Falling Leaves” on passe d’un état à un autre . Le premier est dans ce doom lourd emprunt de ténèbres et de noirceur alors que le second est une ballade d’une beauté fragile, avec ces quelques notes de guitare et cette mélodie tout en douceur. Yob dévoile en douceur ce visage qu’il nous laissait juste entrevoir quelque fois. Celui d’une réelle beauté et une émotion touchante à travers un chant tout en lumière pour un titre puissant qui s’étend au delà d’une quinzaine de minutes. Comme transporté, on peut être sur que les prochains lives sauront nous mettre la larme à l’œil.
“Lungs Reach” est le titre à part de l’album, car le plus court (5:44) certes mais le plus intense dans un ambiant froid métallique et psychédélique ce titre explore des profondeurs abyssales pour ensuite exorciser le souvenir de la douleur amenées par d’innommables hurlements. Tout s’efface derrière cet état second avant un final inattendu et à l’image d’Amenra, transporte l’auditeur dans tout les états. Yob est lumière et amour surement mais au fil de cet album prouve aussi que la frontière entre les émotions est fragile et rien n’est aussi fort que la douleur, cette dernière n’est jamais éloignée. “Original Face” rappelle à travers sa fureur dévastatrice que l’équilibre est précaire et la convalescence est un long processus avant le repos du coeur malmené qu’est ce dernier “Our Raw Heart” concluant en apothéose sur un final lumineux et chargé comme un tourbillon d’émotions. On a une pensée à “Marrow” et le talent de Scheidt d’écrire une musique aussi brute que fragile . La larme est réellement versée.
Yob ne laisse jamais indifférent et ce 8eme opus confirme la règle. Loin d’être une thérapie pour son chanteur Our Raw heart est un nouveau visage qui s’est totalement dévoilé. Moins de growls abyssaux, ce doom rampant et protéiforme aux brefs et spectaculaires instants de lumière laisse maintenant la place à plus de clarté. C’est la lumière d’une aube nouvelle nourrie des ténèbres passés, qui repoussera certes les coeurs réfractaires mais en domptera d’autres. Aucune usure du pathos, par sa beauté et sa force cet album bouleverse et transporte , Our Raw Heart est une oeuvre à part, portée par une énergie spirituelle si intense que la musique de Mike Scheidt dévoile une autre dimension qui emplit le tableau et l’espace pour en faire une oeuvre qui éblouit par sa profondeur artistique. Cet album est en ce qui me concerne un chef d’oeuvre qui à l’mage de son final laissera plus d’un en manque de souffle.
YOB, Our Raw Heart, Relapse Records, sortie depuis le 8 juin 2018
En concert le 23 Octobre 2018 au Petit Bain avec Wiegedood et Dopethrone. Billetterie
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