Rencontre avec Netta Skog (Ensiferum) – 01/10/17 à la Machine du Moulin Rouge

Un dimanche après-midi pluvieux ça n’excite personne mais quand il s’agit d’aller à la rencontre d’Ensiferum, même une tempête de glace ne nous aurait pas arrêté. Nous avions rendez-vous à la Machine du Moulin Rouge avec Netta Skog, l’accordéoniste et chanteuse du groupe. C’est installé sur les banquettes du sous-sol que nous entamons la discussion.

Peux-tu nous présenter ta carrière ?

Netta [faisant mine de s’emmêler les pinceaux] : Vous voulez que je présente MA carrière ? Pas seulement avec Ensiferum ?

Non, tes premières années, notamment celles avec Turisas.

Netta : Je suis née en 1990 [rires] et j’ai commencé à jouer de l’accordéon à 5 ans. En 2006, j’ai gagné le concours du meilleur accordéoniste de Finlande et l’année suivante, Turisas me contacte pour m’inviter à les rejoindre sur leurs tournées. Je suis resté avec eux jusqu’en 2011. Ça a été super : j’ai parcouru le monde, rencontré de nouveaux amis. Mais j’avais le sentiment d’avoir tout exploré et que le moment était venu de poursuivre ma vie : je n’avais que 16 ans quand j’ai rejoint Turisas. Après avoir quitté le groupe, j’ai commencé mes projets solo.

Turisas avait tourné avec Ensiferum, c’est comme ça que j’ai connu ses membres. En 2014, ils travaillaient en studio sur One Man Army et m’ont demandé de venir jouer et chanter. Et me voici, membre à part entière ! J’oubliais : en 2015, j’ai remporté les championnats du monde d’accordéon digital…

Félicitations !

Netta : Je devais le préciser ! [rires]

Quand Ensiferum t’as invité à rejoindre le groupe, il avait déjà un succès très important. Aucune pression à intégrer un groupe déjà très connu ?

Netta : Nan, à l’époque nous étions déjà amis. Quand ils m’ont invité j’ai répondu “bien sûr, tout ce que vous voulez !”

Comment une accordéoniste comme toi participe à la création d’un album de metal ?

Netta : Facilement ! [rires] Globalement, voilà comment on écrit une nouvelle chanson : Markus, le guitariste, vient le premier avec une idée. On commence à jammer et quelqu’un propose une nouvelle idée et j’ai bien sûr mes propres idées ! Tout le monde est impliqué dans l’écriture. A la maison, j’écris des chansons de mon côté. L’album en inclut une, écrites ave Markus.

Laquelle est-ce ?

Netta : “Feast with the Valkyries”

Une chanson que tu chantes toi même d’ailleurs.

Netta : Tout à fait

 Quelles ont été tes influences pour cette album ?

TU : Je n’ai pas vraiment d’influence… Quand quelque chose de sympa me vient à l’esprit, je le joue, je l’enregistre et youhou c’est parti ! C’est ma manière de travailler.J’écoute beaucoup de musiques différentes, du classique au black metal… Bon peut-être pas jusqu’au black metal mais du heavy metal vraiment hard. Donc je tire mon inspiration de n’importe quoi mais surtout de mes promenades en forêt avec mes chiens. Là j’entends quelque chose dans ma tête. Dans ces moments de silence total, les choses apparaissent dans ma tête. J’étais en train de me promener avec mes chiens quand est apparue “Feast with the Valkyries” [se met à fredonner]”Oh mais c’est super où est mon téléphone ?” [fredonne la mélodie dans son téléphone]. Voilà d’où je tire mon inspiration : la Nature et de nombreux styles musicaux. 

Il n’y avait pas autant de chants clean dans les précédents albums.

Netta : Il y en avait mais pas autant c’est vrai.

 Est-ce lié à ton arrivée au sein du groupe ?

Netta : Hmm, non

C’est une décision générale ?

Netta : Par exemple, quand Markus a écrit “Don’t you say”, il a senti qu’elle devait être chantée en clean. Donc je n’ai rien avoir avec le clean ! Ça dépend vraiment de la chanson. De quoi a-t-elle besoin ? De clean ou de grawl ? [en chantonnant] Je n’ai rien avoir avec tout ça.

Le choix du chant n’est pas lié à un membre du groupe mais bien à la chanson en elle même ?

Netta : C’est exactement ça ! Par exemple, les versions alternatives de “God is Dead” et de “Don’t you say” ont été incluses dans l’album car les deux versions étaient valables et qu’on ne pouvait pas en éliminer une !

 Es-tu d’accord pour admettre que Two Paths est une étape importante dans votre musique ?

Netta : Oui

Quelles sont vos sentiments vis-à-vis de cette évolution ?

Netta : Je dirais que… [cherche ses mots] Nous n’avons pas cherché à produire un album “différent” mais c’est arrivé malgré tout. Pour le meilleur je pense. Nous sommes très fiers du résultat et si certains regrettent l’importance du chant clean, une minorité par ailleurs, ça n’en reste pas moins l’histoire de cette album.

Quelle est ton avis sur l’album ?

Netta : Mon avis ? C’est un super album évidemment !

Et si tu devais le comparer aux albums précédents ?

Netta : Pour moi, ils ne sont pas comparables… Celui-ci est si différent…Dans un bon sens bien sûr ! On retrouve toujours l’esprit d’Ensiferum mais tant de nouvelles choses : rien que le son de l’accordéon ! Il n’y en avait pas avant. C’est vraiment une bonne chose que nous testions ces nouveautés. Peut-être n’y en aura-t-il plus sur le futur album ! On peut rien prévoir…

Avez-vous déjà reçu des avis, des critiques, à propos du nouvel album ?

Netta : J’en ai lu quelques uns : Two Paths, certains aiment, les autres détestent. Des critiques nous donnent 10/10, d’autres 4/10. C’est vraiment…

Two Paths ? 

Netta : Exactement ! C’est ce que nous nous étions dits en écrivant l’album. C’est toujours important de lire les reviews pour la suite. Evidemment, une review n’est l’avis que d’une personne mais les lisons. Elles prouvent que les gens s’intéressent à notre album et c’est bon signe ! 

 Les médias s’accordent à dire qu’Ensiferum s’est imposé comme un leader de la scène folk metal européenne. Partages-tu leur avis ? 

Netta : Si je le partage ? Evidemment : [Rires] Qu’est-ce que je pourrai dire d’autre ! 

En écoutant cet album, il nous a semblé que les paroles étaient plus engagées, notamment en matière de paganisme et de critique de la religion.

Netta : Je n’écris pas les paroles… Je ne sais absolument rien à propos ! C’est Sami [Hinkka, le bassiste] qui s’en occupe. Je ne sais pas comment il s’y prend pour les écrire alors [en chuchotant] ne me demandez rien à ce sujet. Mais je les trouve géniales ! Merci Sami ! 

S’ensuit un grand moment de flottement et d’apartés douteuses entre les deux journalistes du mag’ : une bonne part de nos questions se penchait sur les paroles, leurs sens et les clins d’oeil qui s’y cachaient… Tant pis, on enchaîne ! 

Nous étions particulièrement enthousiastes à l’idée de pouvoir interviewer une femme. Leur place au sein du metal est encore si… 

Netta : Petite. 

Voilà… Comment t’es tu intégrée dans un groupe exclusivement composé d’hommes ? 

Netta : Je suis un des leurs ! Je ne me vois pas comme une femme mais comme un membre avant tout. Tout le monde le sait et personne ne m’accorde de traitement spécial. J’ai pas grand chose à rajouter… 

Et que penses-tu de la place des femmes dans le metal, d’un point de vue plus général ? 

Netta : Les femmes ont pris plus d’importance. Il y a plus de groupes avec des chanteuses de nos jours : Epica, Amaranthe… Beaucoup de groupes, ce qui est très positif. Mais j’ai rarement croisé des musiciennes. Quand il y a une femme dans le groupe, c’est toujours la chanteuse. Eluveitie en a ! Et Ensiferum m’a moi. Citez moi un groupe qui a une femme parmi les musiciens ! 

A part dans les groupes 100% féminins… Tu es une figure d’exception sur la scène metal : un message pour les filles qui voudraient se lancer et qui n’en auraient pas le courage ? 

Netta : J’espère pouvoir les aider : qu’elles voient qu’il y a une femme musicienne dans un groupe, et une accordéoniste en plus ! L’accordéon n’a jamais été l’instrument cool… Y en a que pour les guitaristes, les batteurs mais les accordéonistes ? Bouuh. C’est ma mission de rendre l’accordéon cool ! J’aime recevoir des messages de fans du genre “tu joues dans Ensiferum et tu fais de l’accordéon, j’ai toujours voulu en faire et je me lance enfin”. 

Comment le groupe se prépare avant un concert ?

Netta : Je me chauffe la voix et je fais des étirements, l’accordéon est tellement lourd ! Autrement, nous restons ensemble en coulisse à plaisanter et à rire : c’est le meilleur moyen de se préparer, être ensemble et passer un bon moment.

Dernière question, tu aimes jouer en France ?

Netta : Tout à fait, c’est l’un des meilleurs pays où j’ai joué. C’est toujours un plaisir de venir ici.

C’est le sentiment que nous avons eu en vous voyant cet été au Motocultor !

Netta : C’était notre meilleur concert de l’été. C’était vraiment bien. On s’est bien amusé malgré la disparition de nos costumes de scène à l’aéroport. Nous sommes très excités par le concert de ce soir [en murmurant] c’est l’effet de Paris !

Merci beaucoup Netta et bonne chance pour ce soir !

Elle repart au trot pour un autre interview, nous laissant remballer, rêveurs. Le moment est venu de nous retirer (et de faire le point en attendant le concert autour d’une bière bien méritée) !

Illustration Netta

Texte : Emiel-Regis et Fable

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