
Deux années après la sortie de Trust Fall, Incubus, que l’on ne présente plus, revient pour un huitième opus intitulé, avec grande originalité, 8, chez Island Records, le 21 avril dernier. Et sans grande surprise, cette sortie n’arrive pas à la cheville de S.C.I.E.N.C.E, mais ça, on s’y attendait déjà. Les américains semblent se recycler depuis cette apogée, et ce n’est pas pour le mieux, car chaque fois ils perdent un petit quelque chose.
La production assurée par Dave Sardy (Marilyn Manson, Oasis, Fall Out Boy, LCD Soundsystem, Rage Against The Machine) a été mixée par Skrillex. Ce n’est pas la première fois que l’artiste collabore avec des groupes de metal, et en tant qu’artiste en featuring, on aime ou on n’aime pas, mais ça a son charme. Cependant ici, en tant que producteur, ce n’est sans doute pas le meilleur choix que la formation ait pu faire. En effet, 8 est insipide, n’a pas de saveur, aucun punch. Et surtout, aucune vraie batterie. Et pour ne pas aider, il n’aura même rien pu faire pour la voix de Brandon Boyd, qui semble se singer lui-même dans sa façon de chanter, et dont le panel vocal n’est pas mis à l’honneur du tout. La patte du producteur se ressent sur des morceaux tels que ”Loneliest” par exemple, mais il semble y avoir plus de négatif que de positif dans sa participation à l’oeuvre.
L’opus s’ouvre sur la sympathique et radioesque, “No Fun”, à l’outro Letlive-èsque, peut-être meilleur morceau de l’opus, mais qui nous en dit quand même quelque chose de l’entièreté de ce disque : plat par instant, avec une perte de rythme, sans grande originalité, et surtout, pas très amusant.
Nous passerons le désastre de “Nimble Bastard” précédemment connue de par sa sortie en single, ainsi que les malheureux échecs de “State Of Art”, “Glitterbomb” (au refrain catastrophique), et “Undefeated” à cause de leur manque d’énergie. Heureusement, “Loneliest” pointe son nez au milieu du disque. Enfin, un morceau qui semble avoir un peu plus d’âme, plus lourde, avec un rythme plus soutenu, des samples accrocheurs, un effet intéressant sur la voix, et une production plus catchy, sans être pour autant le morceau de l’année. L’album semble se réveiller en partie à partir de ce moment. “Familiar Faces” qui la succède presque juste après (nous parlerons plus tard de la transition désastreuse qu’est “When I Became a Man”) retrouve un peu de pêche, un peu plus dansante, un instrumental plus présent, dans un style plutôt rock-indépendant loin d’être désagréable, et qui reste plutôt bien en tête. Ce trio, avec “Love In A Time Of Surveillance” (dont la pertinence d’une intro stoner si grandiloquante nous échappe compte tenu du reste du morceau) sont peut-être ce qui fera la saveur de l’album, et une guitare plus travaillée, des rythmes plus lourds, sympas, et montrant le talent qu’a Incubus, et que l’on aurait tendance à oublier. Mais ne parlons pas trop vite, car le morceau suivant “Make No Sound in the Digital Forest” nous fait ensuite tomber dans un semblant de post-rock pas particulièrement convainquant, car manquant de délicatesse et d’envolées, qui tient plutôt du “trop en faire pour paraître absolument moderne” qu’autre chose. Avant de conclure sur la plus intéressante et subtilement menée “Throw Out The Map”, au rythme haletant, plus poignant, mais répétitif.
Tout au long de cette découverte, la question que l’on se pose, est surtout celle de savoir ce que nous sommes en train d’écouter. Lorsque débute la countriesque “When I Became a Man”, il nous faudra vérifier que c’est toujours Incubus qui tourne. La formation se perd en voulant proposer des choses trop éclectiques. L’opus est totalement décousu. On passe d’un style à l’autre de façon absolument inélégante, ce n’est pas agréable à l’oreille, et c’est dommage, car cela joue aussi sur l’appréciation générale de l’album, qui a pourtant de bonnes idées… Seulement, pas mises bout à bout, écoutées ensemble.
Au final, le titre “8” est bien choisi, puisqu’il montre à quel point l’opus tourne en boucle à l’infini, sans trouver d’issue permettant de faire avancer les choses vers le mieux. Le problème avec les signes infinis, c’est que c’est ce que tout le monde fait, et qu’à force de vouloir être trop à la mode, on finit par perdre du sens, et de sa qualité.
Texte : Aurélie
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