Split – M. Night Shyamalan

“Ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort”. Mais à quel point est-ce vrai ? Jusqu’à quel point la douleur peut-elle faire naître en nous de la force et renforcer notre volonté de survie ? Est-ce que la fuite peut être une force ?

Toutes ces questions sont celles qu’il faut avoir en tête pour aborder le nouveau film de M. Night Shyamalan qui a à son actif des chefs d’œuvre de tel que Sixième sens, ou encore Incassable. Ses dernières années cinématographiques ayant été un ton en dessous (After Earth, Phénomènes, …), l’annonce d’un film tel que Split avait placé de nouveau mes espoirs dans ce réalisateur de talent. À tort ou à raison ? Il faudra attendre patiemment sur sa chaise pour que je fasse la lumière sur cette question.

La trame du film est finalement assez simple : un homme souffrant de schizophrénie (interprété par le superbe James McAvoy) kidnappe des adolescentes et les enferme chez lui.
Dans ses lignes s’inscrivent des questionnements psychologiques sur la maladie, mais aussi sur notre rapport à la souffrance, à notre façon de l’affronter et de la transformer, et avec elles, une interrogation générale sur l’humain et son évolution éventuelle.
Alors que nous faisons face à Barry, Dennis, Hedwig, Patricia, coexistants au sein du corps du personnage principal, et tous plus convainquants et inquiétants à leur manière, les trois adolescentes, elles, sont les actrices des questions qui nous touchent en tant qu’humains : ne rien avoir vécu de mauvais ne nous préserve pas que cela puisse arriver un jour, et il faut savoir se protéger et apprendre à se défendre, apprendre à réfléchir calmement plutôt que de paniquer et prendre de mauvaises décisions. Et surtout, comprendre qu’il y a toujours une leçon positive à tirer de tout événement, et que chaque blessure aide à construire notre armure.

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Mais à mon sens, le réalisateur se perd dans son propre scénario, qui s’essouffle sur la fin, et finit par opter pour la facilité en suivant les chemins les plus convenus pour servir sa cause, ce qui le conduit à laisser des scènes voire même des personnages sur la touche.
Au final, les personnages, tout comme d’histoire, restent plus ou moins en surface, on aperçoit tout juste qui ils sont (y compris les personnalités multiples, qui sont présentes au nombre de 5 sur les 23 différentes), et l’on a l’impression que certains éléments ne sont là que pour aider superficiellement au scénario. De même que les scènes présentant les filles en petites tenues n’ont pas grand intérêt dans l’histoire, et auraient pu être évitées.
Pour autant, le jeu d’acteurs est remarquable, surtout celui de McAvoy, qui est littéralement bluffant. Ses changements de personnages face caméra, que l’on peut discerner à ses seuls traits de visage, ou à sa façon de se tenir ou s’exprimer sont incroyables. On y croit. Il nous plonge profondément dans l’histoire, à une vitesse folle, si bien que les bémols du film passent presque inaperçu le temps de la séance.

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C’est sans doute pour cela que Split tient si bien son rôle de thriller et de film d’épouvante : nous sommes tenus en haleine et, mis face à ce personnage complexe, nous en arrivons à nous demander comment nous agirions dans cette situation, comme si nous y étions.
De plus, la touche d’humour du film sert cette facette angoissante. Nous rions, mais de façon presque nerveuse. Nous ne savons plus bien s’il est approprié de rire ou pas, alors que nous avons peur en ce même moment. Les sentiments se mêlent, l’incompréhension et la confusion naissent et grandissent tout au long du film, dans lequel nous avons parfois l’impression d’être perdus, comme si nous nous trouvions dans l’esprit de Kevin. Mais parfois cela va trop loin, et nous restons avec un “pourquoi ?” face aux choix du réalisateur, qui nous laisse sur notre faim, ou avec nos questions.
Bien sûr, le film est truffé de clins d’œil qui satisferont les fans du travail de Shyamalan, à l’instar de la scène finale, et cela noue la complicité du réalisateur avec le public, mais sa façon de le faire, sans grande subtilité, pourrait laisser sur la touche ceux qui n’ont pas la référence, et c’est un peu dommage.

split 3Au final, Split peut être un film qui divise, lorsque nous prenons du recul par rapport à ce qui le constitue, de l’intérieur. Pour autant, si nous regardons notre seule première expérience de visionnage, en superficie, il semble être un parfait thriller, qui nous prend et nous divertit tout du long.
Il est, d’une certaine façon, à l’image du personnage de Kevin : uni à l’extérieur et visiblement bien, mais complexe, sujet à questionnement, et disparate à l’intérieur, avec des aspects que tout le monde ne peut pas comprendre. Et, plus important, avec une once de morale qui réside derrière tout ce qui ne semblait pas aller.
Split se révèle être une expérience plus riche, humaine qu’elle n’y paraît, dans la réflexion, sans pourtant remplir toutes ses promesses scénaristiques, malheureusement, malgré son esthétique impeccable et son casting idéal.

En tous cas, la prochaine fois que vous vous prendrez la tête avec vous mêmes, faites attention à ne pas vous retrouver avec des jeunes filles dans votre sous sol !

Réalisé par M. Night Shyamalan
Sortie française le 22 février 2017
Avec :
James McAvoy : Kevin Wendell Crumb
Anya Taylor-Joy : Casey Cooke
Betty Buckley : Dr. Karen Fletcher
Jessica Sula : Marcia
Haley Lu Richardson : Claire Benoit
Brad William Henke : John, l’oncle de Casey
Sebastian Arcelus : M. Cooke
Neal Huff : M. Benoit
Kim Director : Hannah
Izzie Coffey : Casey, à 5 ans
Ann Wood : la voisine
M. Night Shyamalan : Jai

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