
En cette fin d’année plutôt mouvementée pour Alternative Live, nous avons croisé la route de Damien Bauthamy, l’un des fondateurs de la boîte, pour nous parler de son parcours, de la scène française, ainsi que de ses projets futurs.
Salut ! Comment vas-tu ? Pas trop dans le rush des concerts ? La fin d’année a été particulièrement pleine pour vous…
Damien : Ah si, beaucoup. Hier, il y avait les Never Say Die et dimanche on a Devil Wears Prada avec Memphis May Fire. Après on a le 01,02 et 03 décembre avec deux ou trois dates par jour. Enfin on a vraiment beaucoup de concerts à venir, alors oui, on est vraiment dans le rush.
Vous avez enchaîné les dates sold-out, vous attendiez-vous à cela ?
D : On s’y attendait pour les trois quarts, je dirais. Et puis, il y a eu quelques surprises, comme il y a eu quelques surprises dans le mauvais sens, en fait… Quelques déceptions. Il y a des dates où l’on pensait remplir, et qui au final ne marchent pas comme on le voudrait.
Comme par exemple ?
D : Bah là, dimanche. Tu vois, Devil Wears Prada, ça ne vend pas… Enfin, je pensais qu’on allait remplir, donc on a pris une grosse salle… Au final, ça ne fera pas moche, mais ce ne sera pas comme je l’avais pensé. Pour les autres, je ne sais pas… Il y en a tellement. Il y a eu du bon, il y a eu beaucoup de complets, mais il y a aussi des ratés.
Bon, parlons un peu de toi. A quoi ressemblait le petit Damien ? Quels étaient ses rêves ?
D : A moi ? Mais je n’en avais aucun ! (rires) Quand j’étais ado, j’étais avec ma guitare et… oh, remarque, si, je voulais juste faire des concerts, quoi ! Je n’avais pas de groupe… Enfin, j’avais des potes avec qui on jouait vite fait, on se donnait rendez-vous après le lycée, mais non, non, je dirais que c’est à partir du moment où j’ai commencé à organiser des concerts que j’ai commencé à me dire « là, je veux en vivre ! », tu vois ? C’était juste ça, mon rêve. Vivre de ma passion.
Et du coup, quand et comment est venue ta passion pour la musique ? Est-ce que ton entourage a joué un rôle là-dedans ?
D : Je pense que ça vient de ma mère, qui est accro à la musique. A partir du moment où je rentrais de l’école, il y avait de la musique, quand je partais, il y avait de la musique. Enfin tu vois, j’étais vraiment dans un monde. Enfin, elle, c’était autre chose, c’était plutôt Bob Marley, Phil Collins, ou ce genre de choses. Mon père aussi, d’un côté. Il était très chanson française aussi, comme Aznavour, ou alors il aimait bien les Rolling Stones, et ce genre de choses. Il avait les vinyles et tout. Donc ouais, du coup c’est via mes parents, et du coup c’est quelque chose qui était là, je ne pouvais pas vivre sans. Et même moi, quand je rentrais, je mettais de la musique, c’était logique.
Et quels sont les groupes qui t’ont le plus marqué ?
D : Hm… Blink-182. Je dirais que ce sont mes groupes préférés généralement, ceux que tu essaies d’imiter à la guitare, et c’est pour ça. A l’époque, c’était le néo-metal, et tout ce qui était pop-punk, donc ce sont plutôt les groupes qui m’ont marqué. Que ce soit Linkin Park, Korn, ou ce genre de choses… A l’ancienne, c’était ceux-là.
Comment as-tu découvert le métier de tourneur, et comment as-tu senti que c’était ta vocation ?
D : Il faudrait commencer par comment tout a débuté… En gros, quand j’ai commencé à faire des petits concerts, je ne connaissais pas du tout le monde, tu penses bien. Je faisais des squats, des caves, et même des peep-shows, et au fur et à mesure, je ne sais pas, j’ai aimé organiser tout ça, et j’ai découvert qu’il y avait plusieurs métiers autour de l’organisation d’une date de concert : il y avait le tourneur, l’agent, la personne à la comm’, le régisseur, et petit à petit, j’ai appris tous ces métiers, et celui-là, de tourneur et organisateur de concerts, c’était celui qui me correspondait le plus, celui que j’aimais, donc voilà… Pour moi, c’était aussi logique.
C’est un métier qui est assez difficile au final, donc est-ce que tu as été soutenu à tes débuts ?
D : Oui, j’ai été soutenu. J’ai eu comme un mentor. J’étais son apprenti, il s’appelle Christophe Fernandez, et il avait une société, il était manager ou tourneur de plusieurs artistes : Freygolo, qui était un groupe de punk-rock, de ska, Tom Frager, qui était plus folk-pop, et il y avait un groupe qui s’appelait Feverish à l’époque, et il s’est intéressé à ce que je faisais. Lorsque j’ai commencé à faire des petites dates style Maroquinerie et Batofar, il m’a proposé ses services pour apprendre à exercer le métier correctement, c’est-à-dire faire des contrats, dégager des commissions, vraiment rendre rentable l’activité pour vraiment essayer de pouvoir en vivre. C’est vraiment lui qui m’a tout appris. Même au niveau administratif, il m’a donc appris à faire une facture pour un artiste, des contrats. Donc oui, je lui dois beaucoup.
Et au niveau de la famille, surtout à ce moment où ce n’est pas reconnu, ce n’est pas trop difficile lorsqu’on annonce qu’on veut se lancer là-dedans ?
D : Non, enfin j’ai toujours été un électron libre. Mes parents me suivaient dans ce que je faisais. Mon père, tout ce qu’il voulait, c’était que j’aie un taff. C’était plutôt « Continue le maximum tes études, et s’il te plaît dégote un taff, c’est tout ce que je te demande », donc voilà. Il m’a totalement laissé choisir, tout ce qu’il voulait, c’était ça. Et en effet, j’avais trouvé un travail à côté à l’époque, en plus. J’étais éducateur pour un enfant handicapé. Donc j’avais ce taff, et à côté je faisais mes dates de concert, donc lui m’a lâché à ce niveau. Et ma mère, elle, est un peu toujours dans les étoiles aussi, donc c’était un peu « Fais ce que tu veux si ça te plaît », donc je n’ai pas été super materné à ce niveau. Je veux dire, je rentrais à pas d’heure, j’allais à plein de concerts, je n’étais pas… J’étais libre, je n’avais aucune pression de mes parents, aucune. C’était cool.
Donc en 2008, tu as créé Only Talent Productions, filiale de Medside. Comment cela s’est passé ?
D : Bah justement, Medside, c’est la boîte de Christophe Fernandez et c’est à ce moment-là, quand il a cru en moi, et quand il m’a dit qu’il m’ouvrait un genre de pôle en me disant « tu t’en occupes, tu gères tout, tu utilises mes comptes en banque… », c’était assez énorme. Moi, de mon côté, j’étais jeune, donc je trouvais ça super cool, et il m’a dit « trouve un nom, lance le site, fais tout, occupe-toi de tout », et puis voilà, j’ai lancé Only Talent Productions assez facilement, parce qu’il faisait tout ce que je n’aimais pas, il s’occupait de tout ce qui était paperasse administrative, au niveau des déclarations de la société, donc je n’ai pas eu grand-chose à faire sur ça.
Et comment s’est fait le passage de Only Talent Productions à Alternative Live ? Comment se sont noués les liens avec Leny, Anthony Chambon, qui en sont les co-fondateurs ?
D : Je pense qu’il y a une évolution dans ce métier qui commence à être un vrai métier. Comment dire… Avant, par exemple, il n’y avait pas de formation d’entrepreneur de spectacles, et maintenant il y en a une. Tout s’est professionnalisé il y a 5 ans, je dirais. 5 ou 6 ans, et je l’ai vu. J’ai vu que des petits arrivaient. Que de nouveaux organisateurs arrivaient en province, ou même à Paris. Et je commençais à avoir de la concurrence, vraiment. Il était temps de m’allier avec quelqu’un d’aussi fort que moi pour pouvoir faire une structure qui tienne la route, qui puisse sortir de tout ça, ressortir de toutes ces petites assos qui commençaient à naître. Donc il y avait mon ami Anthony Chambon, qui avait Emodays avec qui on était déjà ami depuis peut-être dix ans, et on en a parlé. Il y a eu un autre facteur, qui était Leny Bertelini que j’ai rencontré au Batofar lors d’une soirée, et qui me disait « Voilà, je travaille chez Gérard Drouot Production, mais ce que je préfère comme musique, c’est ce que tu fais toi, donc il faudrait faire un truc ensemble », et moi j’avais ce projet depuis un moment, réunir beaucoup d’acteurs jeunes de la scène. Certains n’ont pas suivi d’ailleurs… Bref, donc on s’est vu tous les trois, on s’est dit « voilà les mecs, c’est le moment, il faut y aller, si ce n’est pas maintenant ce ne le sera jamais », parce qu’il y avait d’autres boîtes à côté qui commençaient à fusionner aussi, donc il fallait avancer rapidement. Voilà, il y a deux ans, on a fait notre première réunion, on a fait notre budget, on a tout créé, et on a fait Alternative Live.
N’est-ce pas un métier difficile en France, surtout lorsque l’on voit l’état de l’industrie musicale actuelle ?
D : Dans notre genre, ouais. Dans ce style-là, bien sûr. C’est con, mais j’aurais préféré en étant gosse aimer… Je ne sais pas… Le rap ou la pop ou la folk, c’est beaucoup plus facile (rires). Mais j’aime ce style-là, donc je me bats et effectivement, ce n’est pas simple tous les jours. On est débordés, on fait des semaines de 60 heures pour un salaire avec lequel tu ne fais que vivre, donc ce n’est pas simple… On ne continuera pas longtemps que dans ce style. C’est pour cela que l’on pense à s’ouvrir prochainement. Enfin, on s’ouvre à ce que l’on aime aussi. Je veux dire, j’écoute beaucoup de hip-hop en ce moment, donc on s’ouvre à ce style, la pop j’en écoute tout le temps, surtout quand la prod est top derrière. Je suis quelqu’un de très éclectique donc on s’ouvre pour pouvoir résister justement, et pour pouvoir continuer de produire à côté des groupes plus rock alternatif, dont on est vraiment fans.
Du coup, le genre alternatif a vraiment été choisi par passion ? Comment as-tu senti le potentiel dans ce genre ?
D : Par passion oui, absolument. Le genre alternatif sinon, c’était à l’époque, avant Only Talent Productions, où je commençais à faire mes petites « salles », quand je faisais le Batofar, jusqu’à la Maroquinerie. Lorsque j’avais une asso qui s’appelait Hold On Productions, et c’est avec cette asso que j’ai eu un déclic. Je me suis dit « putain, il n’y a personne qui fait ce genre de musique, et ça commence à arriver ». Il y avait tous ces labels : Victory Records, Drive Thru Records, et eux c’était plus pop-punk, Victory c’était plus hardcore, et il y en avait plein, il y avait Life Force, Revelations, Vagrant, et j’ai vu que personne ne s’en occupait, ou alors très rapidement. Les gars faisaient un concert dans l’année, donc j’ai vu le potentiel à ce moment-là. J’ai vu tous les groupes qui ne passaient pas par la France, et c’est là que je me suis dit « c’est bon, je m’en occupe ! ».
D’ailleurs, que penses-tu de l’industrie musicale en France ?
D : C’est vaste, comme question. Je trouve qu’elle est trop renfermée sur elle-même. Il y a beaucoup d’aide pour le développement français, et c’est normal, c’est notre langue et il faut la mettre en avant. Nous, par exemple, on n’est pas du tout aidés, on a un financement indépendant. Du moins pour le moment on n’est pas aidés, et puisque tout le monde le sait, l’industrie de la musique est en crise depuis belle lurette, et du coup je trouve qu’en tant que producteur de concert c’est dur. C’est très dur. De plus, avec les récentes attaques, dont celle du Bataclan, on a souffert terriblement. On galère à remplir les salles, on se bat, on se bat beaucoup, on galère à développer le profil d’un artiste en France. Enfin, d’artistes étrangers, je pense. Je crois qu’on a quelque chose comme 80% d’artistes étrangers en ce moment dans la société, même 90%, donc c’est pour ça qu’on n’est pas soutenus non plus je pense, parce qu’on a surtout des artistes étrangers. Mais ouais du coup c’est critique, c’est super difficile, parce que la France n’est pas du tout axée sur l’anglais par exemple, et donc faire venir des groupes étrangers, parce qu’ils ne sont pas assez connus, c’est compliqué. Mais après, si tu veux parler d’une façon générale, c’est la merde. L’industrie musicale c’est compliqué, si l’on parle de la France en tous cas.
Et du coup, n’as-tu jamais pensé à tout lâcher et partir à l’étranger ? A quel point est-ce important pour toi de continuer de faire vivre ça en France ?
D : (Hésite) Pour refaire la même chose ? Pour tenter le même métier ? Je ne pense pas. Non, parce qu’il y a d’autres gens qui font la même chose ailleurs et qui le font très bien, donc c’est trop tard maintenant. Tout s’est déjà créé ailleurs, donc… Par contre, j’ai déjà eu l’envie d’arrêter. Tu sais, quand tu manges que des pâtes 24h/24… Là ce n’est plus le cas, mais quand j’ai monté le truc, c’était compliqué. Il y a eu plein de fois où j’y ai pensé. Puis travailler à trois associés c’est compliqué. Il y a plein de trucs où il faut s’entendre… Donc oui, j’ai déjà eu envie de lâcher et de jeter l’éponge.
Et si tu n’étais pas tourneur, qu’est-ce que tu serais ?
D : Hm… Je serais musicien ? Je continuerais, je me battrais encore plus pour les groupes que j’ai eus, Borderline à l’époque ou Our Theory dernièrement. Le temps que j’ai mis pour ma boîte, je l’aurais mis pour mes groupes, je me serais encore plus battu, c’est sûr.
Justement, tu es musicien à côté. Penses-tu que cela ait joué un rôle important dans ta carrière de tourneur ? Comme par exemple pour savoir quelles peuvent être les attentes d’un artiste ? Ou pas du tout ?
D : Si, si. Je pense que si ! Ce n’est pas le fait d’être musicien… Parce qu’en plus, le fait d’être musicien, c’est un bien grand mot. Tu vois, je frotte des cordes (rires). Mais le fait d’avoir tourné un peu, d’avoir vu comment ça se passait dans d’autres pays, de connaître les demandes des artistes quand ils arrivent à la salle à 14h. De savoir comment les accueillir. J’ai à peu près tout vu dans le métier à mon humble niveau, dans le concert, donc du coup j’ai appris comment recevoir un groupe… Enfin, je pense. Je pense savoir les comprendre et comprendre ce qu’ils veulent eux aussi. Parce que par exemple, on s’en fout du lieu. Que ton lieu soit pété. Eux, ce qu’ils veulent, c’est d’être bien accueillis, d’être respectés, que le son soit bon pour que leurs fans kiffent. C’est le plus important. Le plus important ce n’est pas d’avoir un miroir dans les loges, ou la bonne marque de fromage au repas tu vois. Ils s’en foutent, c’est autre chose. Il y a certaines choses qu’ils veulent absolument, et c’est cela qu’il faut respecter.
D’ailleurs, tes choix se portent plutôt sur ce que tu apprécies, ou ce qui peut fonctionner ?
D : On fait par priorité ce que l’on aime, forcément. Donc ça, on le fait déjà depuis plusieurs années. Et on nous propose plein de trucs parfois, où l’on n’accroche pas forcément. Que ce soit pop, ou même il y a du metal qu’on n’apprécie pas. Tu vois, si on nous propose un gros groupe de death metal, black, qu’on n’aime pas, on nous dit que c’est gros et qu’il faut le faire tourner, on le fait tourner. C’est un métier, c’est mon métier, et je sais le faire, comme je saurais faire tourner Pokora par exemple, je saurais le faire ! C’est pas prévu, hein, ce n’est pas mon but, absolument pas, mais je saurais le faire. Et s’il faut faire rentrer de l’argent pour ensuite faire ce que j’aime, comme un jour Blink par exemple, il faudra le faire, et ça ne me dérange pas. Absolument pas.
Est-ce que vous avez, au sein d’Alternative Live, des pôles différents, ou chacun une spécialité ?
D : Non, pas vraiment.. Par exemple Anthony, parce qu’il a eu un cursus master spécialisé dans tout ce qui était labels, il comprend tout ce qui est métier de l’édition, et tout ce qui est administration. Il est formé à ça. Moi, je suis plus un geek. En tous cas, j’ai été un gros geek à l’époque. Donc c’est moi qui m’occupe plus du côté informatique, du site internet, des billetteries, de tout ce côté-là. Et Leny qui était plus dans une approche de grosses sociétés, comme il venait de Gérard Drouot Productions, il était plus expérimenté dans une vision plus corporate, de rentabilité. Puis côté musique, il était plus indie, ou pop, entre autres choses, Anthony est plus punk rock, et moi même si mon roster [catalogue d’artistes, ndlr] est beaucoup plus metal, je préfère le punk rock, donc au final… Après, j’ai de tout dans mon catalogue, et je les aime presque tous.
« Presque tous » ? T’est-il déjà arrivé de faire tourner des artistes en lesquels tu ne croyais pas du tout ou que tu n’appréciais pas ? (Sans forcément nous dire les noms…)
D : Si je n’y crois pas… A partir du moment où ça marche, tu n’as plus à te poser la question de savoir si tu y crois ou pas… Si ça marche, oui, il faut le faire tourner. Donc oui, ça m’est sans doute déjà arrivé. Après oui, faire des tournées de groupes que je n’aime pas, ça m’est déjà arrivé. Mais tu dois le faire, ça fait partie du métier. Si tu dois faire les 10 groupes inconnus que tu kiffes, tu vas ramener zéro, et tu vas perdre de l’argent, tu dis au revoir à tes employés et tu ne fais plus rien. Donc oui, c’est important, il faut être ouvert, et au final il faut apprécier, il faut savoir passer au-dessus du côté « putain, c’est de la merde ou j’aime pas ». Moi, je regarde plus loin : je vois toute la prod qu’il y a derrière, tous les gens qui ont taffé dessus. Je le redis, on me propose de faire tourner un gros artiste pop, je pense qu’il y a des gens derrière qui ont taffé dessus, et je pense que ça vaut le coup. Puis même, toi, tu peux rajouter ce côté rock que tu as, et proposer aussi des idées, donc voilà ma vision.
Quel a été ton meilleur souvenir de concert ? Ta plus grande fierté ?
D : Je ne sais pas… Souvenir, je pense que c’est mon deuxième concert, c’était Since By Man, qui était dans un peep-show à Pigalle, et c’était en 2005 il me semble, et en gros le chanteur était fou. La sono avait lâché, donc il ne pouvait plus l’utiliser… Enfin, c’était une sono à l’arrache : deux enceintes crades, une table de mixage, avec 4 pistes, enfin je ne sais pas, c’était nul. A un moment la sono était morte, il s’en foutait, il a continué à chanter sans son, du coup il gueulait, il kiffait cet instant-là. Il est même sorti dehors dans la rue, il faisait encore un peu jour, il gueulait, il se roulait sur le sol, il était là le gars tu vois… Il continuait à tenir son micro, même si ça ne marchait plus (rires), c’était mortel, c’était un gros souvenir. Et je me souviens de l’orga, c’était nul, on avait acheté du taboulé, on avait mis ça comme ça sur une table, parce qu’on ne savait pas vraiment comment accueillir les membres d’un groupe tu vois, j’étais jeune, mais ils s’en foutaient, ils ne se prenaient pas la tête, et en partant ils étaient là « mec, merci, c’était vraiment mortel ! ». Avec le recul, je me dis que je les avais accueillis vraiment comme de la merde, mais au final, on était tellement respectueux et tellement gentils qu’ils s’en foutaient, c’était tellement rock’n’roll, et ça c’est mon meilleur souvenir. Après, ce dont je suis le plus fier, c’est de mon festival. Le Damage Festival, en espérant le reprendre prochainement. C’est de me dire que j’ai fait un festival sur deux jours, que ça a cartonné et que les gens ont kiffé. Il y a une bonne aura autour de ce festival, je trouve, les gens l’apprécient.
Quels artistes rêves-tu de faire tourner par-dessus tout ?
D : Oh, j’ai dit Blink tout à l’heure, mais c’est un autre level, c’est pas le but ultime. Il y a des artistes comme Deftones par exemple. Mais si je dis que je rêverais de le faire, ça ne veut pas dire que je veux le faire, parce qu’il y a déjà des gens qui le font très bien, je ne vais pas leur faire concurrence. Donc je ne sais pas, Deftones, j’aimerais bien qu’ils fassent une tournée de 15 dates de suite en France, ce serait la folie. Je ne me suis pas préparé à cet interview donc je ne peux pas te dire d’artistes, mais il y en a vraiment beaucoup.
D’ailleurs, peut-on avoir une idée des derniers titres que tu as écoutés ?
D : Moose Blood ! J’ai écouté ça tout à l’heure. Je pense qu’en ce moment je suis à fond sur le dernier Moose Blood qui s’appelle Blush. Sur le groupe PUP. Le premier album surtout, en boucle. Le deuxième j’écoute beaucoup les singles sur Youtube, il y en a un avec l’acteur de Stranger Things. Il y a aussi… PNL que j’écoute. J’écoute beaucoup PNL en ce moment (rires). Ensuite en rap français, les mecs du S-Crew que j’écoute beaucoup, tout ce qui tourne. Ceux de 1995 en gros, tout ça. Donc en rock metal, je me mets beaucoup le Devil Wears Prada, j’aime beaucoup, c’est très Underoath. Je ne sais pas, j’ai eu une bonne période Parkway Drive récemment. Après j’ai de bonnes playlists via Spotify, qui est un partenaire de la boîte. Ils ont vraiment de bonnes playlists découvertes, donc même si on connaît la plupart des artistes rock de cette scène-là, ils ont vraiment des artistes nouveaux qui sont cools, je la conseille à tout le monde.
Y a-t-il des petits groupes plein de potentiels que tu as repérés ?
D : Des petits groupes étrangers ou Français ? Je peux te sortir Paerish. Bon, là ce n’est plus un petit groupe, c’est en développement. Mais j’aime vraiment beaucoup, et j’y crois. Mais on en découvre tous les jours, c’est ce que je te dis, avec la playlist spotify, je note les noms, je regarde plus tard. J’en ai encore 50 ou une centaine à checker là. Je ne sais pas… en petit que j’écoute, il y a plein de petits trucs qui signent sur des petits labels qu’il faut écouter. Les gens avec qui on travaille qui nous font découvrir beaucoup de groupes, il y en a plein en qui je crois. Il y a The One Hundred, qui tournaient avec Don Broco par exemple, je suis à fond dessus, je pense que ce sont les prochains Enter Shikari si tu veux, dans le délire. Il y a bien un autre groupe, un chanteur avec les cheveux bleus là, leur single est mortel, je me le mettais en boucle récemment, il était sur les Alternative Press Awards, et il a fait un feat… Je me suis dit « mais c’est qui ce chanteur ? » du coup j’ai regardé, je me suis dit que c’était mortel. C’est signé chez Fearless, The White Noise ! Il y en a tellement, la liste est longue de tous les petits groupes que je repère et que je trouve super.
A quoi ressemble une journée type avec Damien Bauthamy ?
D : Alors déjà je me lève tard parce que je me couche tard. Je me lève sur les coups de 10h… Non, 9h30-10h, mais je ne suis pas au bureau avant midi. Mais derrière, du coup, j’y reste toute la journée, jusqu’à des fois minuit… Mais ça aussi vraiment, ça varie. C’est entre 20h et minuit. Je n’aime pas rentrer avant 20h, j’évite, c’est plutôt vers minuit. Mais ça, c’est la fin. Entre temps, quand j’arrive au bureau, j’ai une cinquantaine de mails à remonter, reçus depuis la matinée. Mon taff, c’est en fait beaucoup de journées au bureau. On est content quand on a des dates, voire des concerts, mais c’est beaucoup de bureau surtout, de rendez-vous, comme toute personne dans une entreprise. Et on reste comme ça, facilement 10h dans le bureau à travailler, minimum, par jour ! Sauf les dates de concert où tu te déplaces parce que tu as une organisation de concert. Enfin, on n’organise pas nous-même, on embauche des régisseurs, enfin ça dépend des fois remarque. C’est surtout du coup des journées de bureau. Il faudrait me suivre, et même si tu me suivais 10 heures, tu verrais que je suis tout le temps sur le bureau, sur mon PC en fait. Il y a beaucoup de choses à voir, à découvrir. J’écoute beaucoup de musique, ils en ont marre au bureau. Clairement, ils en ont marre (rires). Donc c’est ça, beaucoup d’écoutes, beaucoup de calculs de budgets, je passe ma vie sur Outlook surtout. Coups de fils, rendez-vous, réunions, prises de tête, comme tout le monde, avec la musique en plus. C’est tout. Donc faut pas s’attendre à plus.
Quel conseil donnerais-tu à quelqu’un qui voudrait faire ton métier ?
D : C’est un peu tard pour te lancer. Mais tu peux venir nous voir et on sera enchanté de travailler avec des nouvelles têtes et de découvrir, pourquoi pas, un nouveau talent !
Quelle est la meilleure chose que l’on pourrait te souhaiter ?
D : Je ne sais pas. Je suis déjà pas mal épanoui. Donc j’aimerais pouvoir encore plus l’être, ce serait pas mal déjà. Je parle dans le style musical. J’aimerais vraiment m’ouvrir, avoir beaucoup plus de genres. Et que ça fonctionne, que la boîte cartonne en fait. Après, que le Damage Festival soit de retour, que le projet que j’ai se réalise pour le futur, je parle du lieu, line-up. Voilà, ce serait pas mal que la boîte continue et grandisse, et d’avoir plus d’employés. Je suis content d’employer des gens. Hier, j’étais au Trabendo, et je me disais « putain, j’ai embauché 3 gars sur cette date et je crée de l’emploi ». Le concert était à perte, j’ai perdu beaucoup d’argent, mais je me suis dit que j’avais créé ces emplois, embauché trois personnes, et j’aimerais en embaucher encore plus, c’est vraiment cool. En plus, c’étaient mes potes certains, donc je suis content pour eux, je me dis que c’est chouette, et j’espère en créer encore plus en me développant, en développant cette scène.
Quels sont tes projets concrets pour la suite ?
D : Bah je te disais, le Damage Festival, vraiment, je vise un développement plus grand. Si je ne l’ai pas fait pendant deux ans, c’est parce que je voulais qu’il soit à la hauteur des attentes du public, donc on fait ça, de le développer ailleurs aussi, c’est le but. On a d’autres festivals, le Longlive aussi. On veut le développer. On veut changer les choses aussi, prochainement. Peut-être lancer un autre festival aussi… A voir. Je ne sais pas, on verra. Voilà, ça c’est le à peu près concret, c’est de toujours suivre nos artistes, et que nos artistes deviennent de plus en plus gros. Je n’ai pas de grosses infos, non. Non, on ne va pas racheter de gros festival à la Download Festival, quoi que… ! (rires) Donc pas de grosses infos, à part nos deux petits festivals qu’on espère voir grandir chacun, et peut-être un troisième. Enfin, je ne sais pas, je glisse ça juste comme ça. On verra. Voilà !
C’est tout le mal qu’on te souhaite en tous cas. Merci beaucoup pour ton temps.
D : Je t’en prie.
Texte : Aurélie
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