
Moins de deux ans après leur show du Trabendo en compagnie des Grecs de Septicflesh, les Portugais reviennent en terre francilienne sur le chemin d’une tournée célébrant les “débuts” du groupe. L’occasion de découvrir L’Empreinte, salle à la programmation surprenante, et qui ce mercredi soir, attire des grappes de tous les âges, plus ou moins chevelues en provenance de la gare RER toute voisine.
Pour peu qu’on ait tendance à l’emphase, c’était le soir rêvé. Dehors, la pleine lune brille comme un sapin de Noël. Près de la régie, un immense chien-guide blanc balance involontairement dans l’ambiance de Wolfheart. A l’entrée, le stand de merchandising, entre “ticheurtes” et drapeaux propose même une bière noire, “Lunaire. Sombre et profonde. Tout comme la musique de Moonspell”. Avance, apprenti loup-garou, l’expérience totale t’attend.
Malheureusement, tout n’est pas parfait, et il s’en faut de peu, mais Volker ne montera pas sur scène, la faute à un véhicule récalcitrant. Leur set supprimé, l’occasion s’envole pour une grande partie du public de découvrir les Français. Pour cette fois. Dommage, mais ce n’est que partie remise.
Der Weg einer Freihet étant pour moi une découverte totale, la curiosité fait place à la confiance lorsque le trio allemand entame son set. Un chanteur arborant un t-shirt Dissection ne peut pas être tout à fait mauvais, et la musique confirme cette première (bonne) impression. Ça crache, c’est brutal, et soudain, le trio enchaîne sur de longues plages mélodiques qui posent l’atmosphère comme un sac de glaçons sur une tendinite. On vogue quelque part entre Emperor et Dissection justement, ce qui s’avère extrêmement agréable. Il paraît qu’ils chantent uniquement en allemand. Admettons. En tous cas le mal est fait ; voilà un groupe qu’on retournera voir avec bonheur.
Au moment où Moonspell entre sur scène, l’intro musicale et la décoration de la scène indiquent que malgré des infos contradictoires, les Portugais joueront bel et bien l’incroyable album Irreligious, un classique du genre. Tout doute s’efface à l’entame d'”Opium”, souvent plutôt joué en fin de set, et la salle bascule immédiatement 20 ans en arrière, voire dans une autre dimension. L’album défile, en intégralité et (de mémoire) à peu près dans l’ordre. Et c’est rudement efficace, nombre de fans considérant l’album comme le meilleur. Les têtes hochent voire secouent, les cheveux s’agitent. Sur scène Fernando Ribeiro emplit tout l’espace avec sa gestuelle rodée, et ce malgré son air parfois constipé. Avouons-le, une aptitude surprenante.
Au fil du concert, Moonspell illustre les phases stylistiques traversées par le groupe au fil des deux dernières décennies. Du rock gothique avec cape kitsch pour “Vampiria” aux riffs plus agressifs de “Night Eternal”, l’ambiance oscille entre berceuse malsaine et fin du monde. Entre exutoire et fin du monde. Avec une mention spéciale à Pedro Paixão qui se dandine joyeusement derrière ses claviers déguisés en orgue de chez Jules Verne, puisque les autres musiciens restent plutôt statiques, comme à leur habitude. Mais tous restent en scène un moment à la fin, sourire aux lèvres, distribuant poignées de mains, setlists, baguettes et autres réjouissances.
En résumé, la formation portugaise prouve qu’elle détient toujours la recette quasi magique, celle qui permet aux amateurs de death d’apprécier un concert gothique et vice-versa, celle qui fait sa singularité et son succès. La soirée, placée sous le signe du duo atmosphère/déferlement sonore, remplit ses promesses et on en ressort les oreilles qui bourdonnent et le cerveau embrumé. Avec un coup d’oeil à la lune.
Texte : Sarah
Photo : Lesly
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