OKKULTOKRATI – RASPBERRY DAWN

Il y a des groupes qui fascinent à travers leur évolution musicale. Comme çi on avait jeté un sort sur ce disque. Comme zombifiés quand l’incantation est lancée, perdus dans un espace temps totalement à part, une autre réalité en dehors de la terre. En territoire des esprits, des sortilèges et de la magie occulte. Quand on est norvégiens et qu’on s’appelle Okkultokrati nous sommes pas loin, et quand on présente une dernier opus comme Raspberry Dawn c’est tout à fait ça et il est difficile de qualifier ce qui se passe à l’ écoute. Chamanisme ? Occultisme ? Possédés par quelque chose eux aussi, mais quoi ?

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Pour ceux qui connaissent ces norvégiens, et se rappellent de No Light for Mass et Snakereigns on partaient d’un crust / hardcore aux racines punk bien ancrées mais ils commençaient à donner dans le ténébreux avec un soupçon darkwave ensuite sur Nights Jerks. Un changement de style pas si étonnant mais qui ne laissait présager que partiellement la surprise qu’est Raspberry Dawn.  A la fois garage, hard rock, punk, cold, psychédélique et hardcore, amoureux des étiquettes, passez votre chemin, les incantations de ces norvégiens risquent de vous faire perdre la raison.

Imaginez les Misfits en ballade avec Robert Plant rencontrant Darkthrone qui emmenait dans ses bagages Iggy Pop mais au passage ils ont fait une halte chez Lemmy Killmister. Voila c’est un peu le bordel et c’est grossièrement que l’on résume car il est difficile de qualifier ce que joue Okkultokrati. Tout le frisson est là. On se laisse tenter, on croit reconnaitre quelque chosee de familier, une voix nous appelle et d’un coup on est déjà hors du chemin que l’on connait, perdu dans cette sombre foret norvégienne. On se laisse prendre à la magie noire qui opère et les brumes envahissent nos oreilles et les alentours.   C’est la teneur de ce Rasberry Dawn…

Des claviers sombres et froids pour ce « World Peace », une voix arrachée et alcoolisée et une darkwave qui ressort du fin fond des années 80 en passant par les fjords de Norvege. C’est distant, froid mais on est “omnibulés” par ces rythmes frissonnants qui réchaufferaient un mort au final. De la révérbation a en crever l’espace, une batterie qui sort le kit des années 80 en mode D-beat.

C’est sombre, l’ambiance est crue et toute la nouvelle mouvance shoegaze hype peut retourner à ses gammes . Okkultokrati est parti dans un endroit ou il est difficile d’aller. Ils brouillent les pistes. Invoquant un sabbat en pleine foret, l’ambiance est mystique, sombre, hargneuse mais on s’y sent bien. Le titre éponyme « Rasberry Dawn » rajoute un soupçon de Ramones dans le rituel occulte au virage punk. « We Love You », Lemmy n’a pas l’air d’être loin, après une intro brumeuse on est pris dans une embardée et ce chant arraché de Henning alcoolisé et limite incompréhensible t’emmène pas loin du suicide et fait son effet. C’est affolant et excitant à la fois d’être perdu dans cette mixture. Le désespoir se fait sentir, We Love You, et on sait clairement jouer la noirceur jusqu’au bout. Un raid trip de 7 minutes qui emprunte lui aussi plusieurs chemins comme la totalité de l’album, tu ne sais pas sur quoi tu tombes à chaque fois. l’écoute est troublante et magnétique.

Avec Raspberry Dawn, Okkultokrati prend un malin plaisir à nous emmener loin ( même très loin) dans ces 8 titres, touche à tout et exalte nos sens. Les morts vivants font a fête et elle a l’air bien trippante. Les titres ont tous leurs caractères et chacuns présentent un trip différent à chaque fois.” Suspension” demande qu’a s’ouvrir les veines, force au plus sur les claviers et l’ambiance goth à souhait dans les références dark and cold, à grand renfort de voix et d’autres effets. Quand à « Hard To Please, Easy To Kill », ce titre me fascine, la reverb est à son max et les influences diverses sont difficiles à souligner tellement que ce titre est comme l’acmé de la sorcellerie du groupe.

« Hidden future » est vénéneux, bourdonnant et psychédélique dans un entre deux rock punk garage et grosse disto pendant 8 minutes non stop et intense. Du coup ’ils t’emmenent dans un monde encore plus loin avec le nébuleux et spatio-temporel “Ocular Violence”. Une certaine légèreté mélancolique, dans une ivresse fiévreuse à son comble, les sens ne sont plus là et tout tourbillonne dans notre esprit, du coup, avant de se prendre un dernier coup de Doc Martens au cul avec « Magic People », la voix d’ Henning et la saturation sur ce bouillon punk font de l’effet et donnent la touche finale parfaite pour cet album. L’antre de la folie est ouverte. C’est crade, c’est classe, hargneux, religieux et désinvolte, c’est tout ça à la fois et ça balance des titres accompagnés seulement d’alcools forts pour se finir comme il faut.

Alors qu’ils balancent 8 titres dont un seul tournera sur les 4 minutes au minimum, le groupe rassemble un pan d’ influences diverses mais pas si éloignés que ça pour en faire un chef d’oeuvre d’art brut bien punk et je m’en foutiste ( en façade). Quelque chose qu’on espérait plus depuis des lustres. Un chef d’oeuvre fou pour certains, juste du bruit pour les autres mais ce qu’on peut dire c’est qu’ Okkultokrati, en plus de fasciner par cette capacité d’évolution et de création limite mystique, présente un album qui risque de devenir un indispensable pour les amateurs du genre dans quelques années. Mais quel genre ? Telle est la question car ils sont tout et rien à la fois.

Okkultokrati, Rasbperry Dawn, Southern Lord Records, sortie octobre 2016.

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