
Le 06 novembre dernier avait lieu le concert de Being As An Ocean à la Boule Noire à Paris, ouvert par Casey, Capsize et Burning Down Alaska. Autant dire que nous n’aurions raté une telle affiche pour rien au monde.
La soirée commence donc avec le jeune groupe Casey. La voix fébrile du frontman retentit, et annonce parfaitement l’ambiance empreinte de délicatesse et de poésie de la soirée qui suit. Joel avait déclaré son amour pour ce petit groupe sur twitter quelques heures avant le show, et aux premières notes, nous comprenons pourquoi : une voix à fleur de peau, écorchée vive, pleine de peine, de rage, d’un chanteur aux mains tremblantes et dont le cœur semble à la limite de l’implosion tant les émotions se bousculent, superbement accompagné de mélodies délicates et fortes à la fois. On pourrait presque y voir des BAAO junior. Mais avec leur truc en plus : la fragilité, l’innocence de la vie qui réside derrière ces paroles intelligentes et travaillées. On en prend plein la gueule, vraiment. Et le terme est faible. Ceux qui en douteraient n’ont pas assisté à cette leçon de vie, déclamée a cappella par le frontman, avant qu’il ne lâche le micro et nous abandonne au silence d’une salle stupéfaite, confrontée à sa propre intériorité, sa propre conscience bousculée par ces vers de poètes.
Mais l’ambiance se réchauffe très vite avec la performance de
Capsize. Habitués de la scène, les garçons nous offrent un set plusconfiant, plus assuré, mais pas moins fort pour autant. Le pit est enragé et les chutes se succèdent. La formation a son propre public (pour ne pas dire que beaucoup sont clairement venus principalement pour eux), qui ne manque pas de se faire remarquer en hurlant les paroles sous le nez du chanteur, qui n’hésite pas à leur tendre le micro, et même à se jeter parmi ses fans et traverser la foule jusqu’à monter sur le rebord du mur d’enceinte. Avec un set axé sur le dernier album aux compositions bien équilibrées et fortes, les musiciens ont très visiblement conquis l’audience, et c’est un succès bien mérité, car les garçons sont parfaitement rodés musicalement, ce qui est vraiment appréciable. Il n’y a rien à redire.
La glace fond définitivement avec Burning Down Alaska qui ouvrent leur set avec la splendide “Don’t Ever Loose Your Heart”, reprise en cœur par l’audience. La composition à deux chanteurs est un alliage parfait, faisant honneur à leur nom : glace et feu sont mêlés, entre délicatesse et rage, transformant nos états inférieurs de la meilleure façon qui soit, tout en nous déroutant, nous faisant perdre racine. Par contre, contrairement à la fonte des glaciers, ce n’est pas à la destruction de la vie que nous assistons mais bien plutôt à sa célébration. C’est un show plein de dynamisme, de vitalité, mais malheureusement, le pit s’avorte très vite, et l’on ne comprend pas bien pourquoi. Musicalement, les garçons sont irréprochables, mais la fusion entre le public et le groupe ne se fait pas entièrement, et certains semblent presque s’ennuyer – la fatigue, peut-être ? Ou à cause d’un show trop lisse ? On ne saura pas bien pourquoi, mais la performance nous laisse un peu sur notre faim…
Et ces glaciers laissent place à l’océan de Being As An Ocean. De mémoire, il n’y a pas une seule fois où les garçons n’ont pas bouleversé leur auditoire lors d’une venue à Paris, et ce soir ne dérogera pas à la règle. Armés de morceaux forts et incisifs, les garçons s’attaquent directement à nos âmes, en leur délivrant des messages d’humanité hurlants de douleur, des appels à l’aide, à l’action. Et le fait de commencer le set par “OK”, qui décrit une situation qui n’est pas vraiment “ok”, en est un signe, puisque nous ne voulons plus de ça. Nous voulons être “ok”, et nous allons travailler à l’être. C’est montrer notre mal, pour que plus jamais il n’existe. Pour appuyer cela, Joel n’hésite pas à s’élancer dans la fosse et bousculer physiquement ses fans.
Les paroles se vivent, s’inscrivent dans la chair, les mots sont des coups que l’on prend en pleine face, et personne n’est épargné. Being, c’est cette rage, cette colère que l’on ne comprend que lorsque l’on est disposé à l’écouter. Sans surprise, c’est une véritable douche que nous prenons, et nos corps transpirants en sont une belle image. Being en live, c’est beau, c’est fort, et les mots font toujours défauts pour exprimer ce qu’il se passe. C’est un échange magnifique, d’un public qui vit les morceaux tout autant que le groupe, d’un frontman qui enchaîne les bains de foule en passant plus de temps parmi nous que sur scène, et qui s’en va en prenant autant de monde que possible dans les bras en les remerciant d’être là. La chaleur de leurs concerts est incomparable, et réchauffent les cœurs les plus glacés, en les immergeant d’Humanité, dans ce qu’elle a de plus grand. Ils forment les terres qui unissent les Hommes, qui les empêchent de sombrer, de se noyer dans les pleurs, dans la tristesse, ils sont les continents qui gardent la tête hors de l’eau des océans.
Au final, avec une affiche pareille, il était couru d’avance que nous allions en prendre plein les oreilles. Ce n’est donc pas une grande surprise. Pourtant, ce qu’il nous en reste, c’est ce sentiment toujours surprenant, de se laisser décontenancer par un groupe, qui vous scotche, vous immobilise par leur force, par de simples mots ou mélodies. Des groupes qui vous mouvementent intérieurement, qui vous retournent sans même que vous vous en rendiez compte. Being As An Ocean est ce groupe, par excellence, et réussissent encore une fois leur pari de secouer nos âmes de la façon la plus touchante qui soit. Sans oublier les groupes de première partie, qui ont servi ce message avec brio. Autant dire que les fans du genre se seront sans aucun doute senti… comme des poissons dans l’eau.
Merci aux groupes, à Alternative Live, et à la Boule Noire pour cette soirée.
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