
Il y a des concerts qui vous marquent, mais difficile de mettre des mots dessus. On se bouge, on s’assoit, et après un mois à y penser, à y repenser et à faire mûrir les souvenirs, l’inspiration nous vient enfin. Retour sur cette belle soirée du 16 Avril 2016 au Gibus Live avec Klone, Pitbulls In The Nursery et Kadinja !
De mémoire, c’était une belle journée, on était installé en terrasse de notre bar-QG habituel à Bastille avec des copains, et la bière remplissait nos canons. Passé 18h30, je fausse compagnie à mes amis pour rejoindre cette mythique petite salle parisienne, aussi mythique que peu acceuillante. Je suis, visiblement, un des premiers à arriver sur place, j’en profite donc pour descendre redécouvrir le lieu (mon dernier passage dans cette cave était lors des premiers tours de Emergenza il y a 5 ou 6 ans), et mon imagination avait enjolivé la place : une salle basse de plafond, aux murs noirs, au sol noir, avec un bar rouge pétant blindé de néons, et une minuscule scène encastrée dans un mur entre deux poutres. Non, cette salle ne m’avait pas manqué ! 19H00. Je profite de mon avance pour délivrer quelques flyers aux premiers fans devant la salle, et je teste les réglages de mon appareil photo, je me sers une bière et attends tranquillement le début des hostilités.
Et voici que le premier groupe s’installe. Il s’agit de Kadinja, un jeune groupe aux influences et sonorités typées « Djent », et c’est là que commence le calvaire… Pas le groupe hein ! Les lumières de la salle prennent des teintes jaunâtre, verte, rose, et les spots visent continuellement sous les têtes des musiciens. Un réel plaisir pour les nombreux photographes présents à ce concert… Bref, revenons à Kadinja ! Malgré un son que je juge trop fort, et assez du fait que les mélodies se perdent dans un brouhaha continuel, Kadinja délivre une prestation rythmée et sportive ; hélas je n’y trouve pas mon bonheur. Les guitaristes sont excellents, le chanteur est charismatique et d’une justesse incroyable, le batteur sait faire le show à travers de nombreux plans progs et saccadés… Je ne suis pas sûr d’avoir entendu ne serait-ce qu’une fausse note sur l’ensemble de leurs morceaux, les sons et les ambiances sont visiblement très travaillés, mais, et je cite un ami, « ce n’est pas parce que l’on sait bien tricoter que l’on fait un bon pull ».
Peut-être que je ne suis pas assez ouvert au style, ou peut-être que je n’aime pas assez le Djent, mais j’ai eu l’impression d’entendre un même et seul morceau lors de tout le temps de cette prestation. Les musiciens sautent beaucoup, headbanguent constamment, mais l’ensemble est statique : il y a peu d’échanges entre eux sur scène, ces derniers sont constamment à la même place, et il en découle visuellement une prestation très froide. De plus, entre les morceaux, les lenteurs sont palpables, malgré les interventions du chanteur pour masquer ces blancs, et les injonctions de ce dernier envers le guitariste qui lance manuellement les samples les uns après les autres. Je n’entendais pas toujours très bien, mais je constate aussi que deux ou trois titres, à venir sur leur album, ne possèdent pas encore de nom, ce qui, pour moi, dénote un certain manque de préparation et de présentation du groupe. Du côté de la fosse, celle-ci s’éveille lentement, les gens applaudissent, remuent un peu la tête, le tout dans une attitude discrète et timide. Quelques acclamations entre les morceaux, et tout de même, un bon échange entre le frontman et ses fans. En conclusion, je conseillerai à Kadinja de varier leur répertoire, peut-être même à proposer des morceaux sur leur album à venir plus « catchy », moins techniques pour que l’on puisse s’imprégner plus aisément de leur style. J’ai vu un groupe vraiment très bon, techniquement parlant, mais peut-être pas assez préparé à la scène, avec des transitions entre les morceaux un peu bancales, et un show mal ficelé.
Setlist :
- Shades
- Episteme
- Nouvelle Sans Nom
- Nouvelle Sans Nom
- GLHF
- Dominique
Premier changement de plateau, j’en profite pour me glisser hors de cette salle si peu conviviale pour prendre l’air… Et non, un vigile m’arrête et m’explique que toute sortie est définitive. Je me dirige penaud vers le bar, et j’attends donc ces fameux Pitbulls In The Nursery. Il s’agit d’un groupe issu de la région parisienne, que je n’avais jamais écouté, et dont le nom m’évoquait peu. Je les vois monter sur scène, et à leur dégaine, et les premiers soundchecks aux saturations lourdes et criardes, je m’attends à voir un groupe de la veine « Hardcore ».
C’est là que « The Oath », issu de leur second album, retentit et me pétrifie. Je suis face à un mur de son parfaitement équilibré, à deux guitaristes au jeu agressif, un bassiste époustouflant au jeu hallucinant, un batteur dont le contraste entre sa frappe violente et son jeu aérien sont à noter, et surtout, un frontman totalement à fond dans son trip, en transe avec sa musique et dont son chant se pose à merveille sur un style axé entre le Death, le Post-Metal (sisi, vous savez, de lourdes ambiances avec de la saturation à fond les ballons), et le Prog.
Je suis fan, et hypnotisé par leur prestation, à tel point que j’ai laissé passer trois morceaux avant de penser à faire des photos. Je suis loin d’être le seul dans cet état : je suis au centre d’une fosse déchaînée, qui hurle à chaque intervention du frontman de PITN. Je retrouve dans leurs morceaux tout ce que j’aime : une ambiance très noire, très lourde et très profonde, de grandes nappes de guitares gorgées de Delay et de Reverb qui apportent le petit plus « Post » de leurs compositions, des riffs tranchants et violents comme on peut en entendre chez Meshuggah, et parfois j’arrive même à trouver des comparaisons avec quelques morceaux d’Opeth (sur l’album Deliverance) lors de leurs changements soudains d’ambiances. On assiste à une grosse prestation, mouvementée, violente, prenante, et le groupe sait communiquer avec son public : le frontman remercie constamment son public « Sans vous, on n’aurait pas de raison de faire ce qu’on fait » lâche-t-il avant le dernier morceau, « Crowling ».
En conclusion de cette seconde prestation, j’ai eu la chance d’assister à un groupe passionné et tout autant passionnant. Ces musiciens prennent un réel plaisir à jouer leurs morceaux et à jouer avec la foule de fans déchaînés face à eux. Ils délivrent un mélange d’influences à la fois transcendantes et musclées, pour proposer des créations originales dans un registre, pardonnez-moi les étiquettes, « Death/Post/Prog ». Et en ma petite expérience de chanteur, j’admire l’impressionnante technique de leur frontman à varier du chant gutural au chant clean torturé. Un régal !
Setlist :
- The Oath
- Rule The Plight
- Calibrated
- Reality
- Insiders
- Lunatic Factory
- Crowling
Place maintenant à ceux que tout le monde attend : Klone ! Ce groupe, originaire de Poitiers, a su se démarquer l’année dernière avec la sortie de leur épatant album Here Comes The Sun, et depuis celui-ci, enchaîne les belles dates, notamment avec leur tournée en « tour support » du grand Devin Townsend.
Il est 22h00 quand Klone monte sur scène. Je n’avais encore jamais eu l’occasion de les voir, mais les récits que j’en avais lu ou écouté citaient un groupe à l’exactitude même de ses albums, et un chanteur à la voix qui ne failli jamais… Et bien c’est vrai ! Klone attaque sur le premier titre de leur dernier album, « Immersion », et quel titre bien choisi : il image parfaitement ce qu’il se passe dans la salle. La foule se masse au bord de la scène, ne laissant que peu d’espace aux photographes, la prestation est intense et superbe. On apprécie notamment le technicien aux lumières qui a utilisé l’écran d’arrière scène pour rajouter un peu de force à ce spectacle.
Contrairement à Pitbulls In The Nursery ou Kadinja, Klone se situe dans un registre plus Rock que Metal, et pourtant, qu’est-ce qu’il doit faire chaud sur scène quand on voit les danses des musiciens. Le son est également très bien géré, et on peut entendre la moindre petite subtilité des riches compositions de cette formation. Et histoire de varier les plaisirs, Klone a su parfaitement mélanger son dernier album avec son prédécesseur, The Dreamer’s Hideaway, plus rythmé, afin de créer un show comblé de variations d’intensités.
Hélas, comme tout concert, les problèmes techniques peuvent surgir à tout instant, ce qui obligera leur guitariste Aldrick à changer de guitare au milieu d’un morceau. Mais cela ne le refroidira, et comme ses acolytes Guillaume à la guitare et Jean Etienne à la basse. Et malgré la voix d’exception de Yann, le frontman, on regrettera un jeu de scène très minimaliste de sa part. Les morceaux se succèdent les uns aux autres, et la fosse ne perd pas en énergie, bien au contraire. Les fans de la première heure, comme ceux des précédents groupes conquis dès le début du spectacle se massent devant cette petite scène et quelques petits pogos commencent même à apparaître sur « Siren’s Song » pour survivre jusqu’à la fin de la soirée.
Klone a su créer son univers propre, tantôt Rock, tantôt Metal, contenant de nombreux riffs et structures empruntés au Rock Progressif, au Post-Rock, qui font que leur style est inclassable, indéfinissable et totalement inédit. Après une telle prestation, et leur dernier titre lourd et poignant « The Last Experience », on ne peut qu’en redemander, et ils ont du répondant, en nous offrant une superbe reprise de Bjork, « Army Of Me » avant le salut final qui clôturera cette belle soirée.
Setlist :
- Immersion
- The Dreamer’s Hideaway
- Give Up The Rest
- The Drifter
- Siren’s Song
- Grim Dance
- Rain Bird
- Immaculate Desire
- Rocket Smoke
- Nebulous
- The Last Experience
- Army Of Me (Bjork Cover)
En résumé, nous avons eu le droit à une belle soirée éclectique, organisée par Klonosphère et Cartel Concerts, avec trois groupes d’horizons totalement différents, mais tous trois à suivre de très près ! Merci à eux, et un grand bravo à tout le public qui s’est déplacé pour soutenir ses artistes favoris, et pour soutenir la scène alternative française !
Texte et photos : Flo. L.
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