
A deux semaines près, cela faisait deux ans qu’ils n’avaient plus foulé les planches françaises. Pour conclure leur Shadowmaker Tour, c’est au Zenith de Paris que les Finlandais d’Apocalytica se sont produits ce vendredi 6 novembre, date initialement prévue en avril dernier. Une jolie soirée qui aurait pu nous réchauffer si nous n’avions pas déjà trop chaud.
Il est 19h45 quand je pénètre dans les gradins du Zénith, et les Australiens de Tracer sont déjà sur scène. Je suis très étonnée : les faire débuter aussi tôt alors qu’ils sont le seul groupe support de la soirée ? Je calcule dans ma tête. Fin de Tracer vers 20h. Début du set d’Apocalyptica à 20h30. Fin du set à 21h30/45 ? Ok c’est vendredi, ok on a tous eu une grosse journée et on est fatigué, mais quand-même, je n’ai pas envie de me coucher avec les poules non plus ! Bon, peu importe… Donc, le trio australien est déjà en train de jouer, et la salle est presque pleine, même si elle a été amputée d’une bonne partie de ses gradins. Les Tracer nous interprètent un rock pêchu, à la limite du Hard FM sur certains passages, qui sait emporter le public dans son tourbillon. Je tique un petit peu sur les lumières, qui semblent bizarrement plus éclairer les premiers rangs de la fosse que la scène. Si les trois musiciens semblent un peu seuls sur la grande scène du Zénith, ils ne manquent pas de charisme et font participer la foule sur chaque morceau, notamment en faisant chanter ou applaudir les spectateurs en rythme. La voix du guitariste/chanteur Michael Brown est aussi suave dans les graves que dans les aigus, et le son de l’ensemble est très propre. Peut-être un peu trop propre d’ailleurs, un peu trop lisse, un peu trop radiophonique à mon goût. Pourtant les gars se démènent, notamment sur leurs derniers single « Astronaut Juggernaut » et « Us Against The World » issus de leur album Water For Thirsty Dogs, mais tout ça me laisse un arrière-goût amer dans la gorge. Ca manque définitivement de ce truc en plus qui les ferait sortir du lot. Dernière soirée auprès des Finlandais pour cette tournée européenne, ils prennent la route dès le lendemain pour le Royaume-Uni pour une série de concerts en tête d’affiche. Gageons que nos voisins d’outre-manche y trouveront leur bonheur.
Alors que la température à l’extérieur est très douce en cette soirée de novembre, il fait très très chaud à l’intérieur de la salle lorsque que Perttu, Mikko, Eicca et Paavo pénètrent sur scène sous un tonnerre d’applaudissements à 20h33. En guise d’entrée en matière, c’est avec « Reign Of Fear », un des rares morceaux totalement instrumentaux de leur dernier album Shadowmaker, que les Finlandais ont décidé d’introduire leur set. Pas forcément la plus connue ni la plus attendue, mais tout de même une bonne mise en bouche. Avec « Grace », les spectateurs se mettent rapidement à applaudir en rythme, et l’on se rend compte que Worlds Collide, sorti en 2007, est encore bien dans les cœurs. Le quator annonce maintenant l’arrivée de Franky Perez, chanteur avec lequel ils ont collaboré sur leur dernier opus, pour l’interprétation de « I’m Not Jesus », initialement chantée par Corey Taylor (Slipknot/Stone Sour). Les premières lignes de voix semblent un peu chaotiques, pas sur les temps, et le micro du chanteur cubain manifestement trop fort. Mais soyons indulgents, cela fait six semaines que les poulets tournent non-stop, un pneu de leur tourbus a même explosé alors qu’ils rejoignaient la France, ils sont juste épuisés. Ils enchaînent alors avec « House Of Chains », un titre où Franky est le chanteur original. Le micro est toujours trop fort et prend trop le pas sur les cordes. Bon, là on commence à le comprendre : si le chant renforce les compos d’Apocalyptica sur le dernier album, en live, ça ne fonctionne pas. Les garçons s’effacent derrière Franky (bien qu’ils soient placés sur la même ligne sur scène), oubliant qu’il les accompagne, et non le contraire. Et cela se vérifiera sur la plupart des titres interprétés en « duo », comme le bien trop mielleux « Not Strong Enough », « Hope, vol. II », ou l’horriblement ennuyeux « Hole In My Soul ». Nous avons face à nous une représentation claire de ce fossé entre Européens et Américains, et le show perd systématiquement en consistance dès que l’autre coco débarque.
Un concert d’Apo ne serait pas un concert d’Apo sans une reprise de Metallica, et pour commencer, le quartet nous balance en pleine tête leur fameuse interprétation de « Master Of Puppets ». Evidemment, tout le monde chante du début à la fin, et les Finlandais retrouvent de leur superbe, faisant tournoyer leurs cheveux et crisser leurs archets. Ils enchaînent directement avec « Inquisition Symphony » de Sepultura, moins connue, mais toute aussi appréciable. On découvre alors que le backdrop a disparu, faisant place à une toile blanche sur laquelle sont projetées des animations. Petite pause pour tout le monde sauf pour Eicca, qui nous ravi d’un solo pendant lequel les gens mettent un sacré moment avant d’être silencieux, ce qui gâche une bonne partie de l’interprétation. En revanche, le silence est somme toute religieux lors du retour de Paavo et Perttu pour une version instrumentale de « Bittersweet ». Le choix de ne pas faire chanter Franky Perez à la place de Ville Valo (HIM) et Lauri Ylönen (The Rasmus) donne une dimension christique au morceau, qui finalement est beaucoup mieux comme ça. En arrière plan, une croix nimbée d’un halo faisant penser à un embrasement prend peu à peu place au milieu des vitraux d’une église sur le grand écran ; un moment complètement spirituel, presque surnaturel, qui s’achève sur le tonnerre d’applaudissements de l’assemblée.
Mikko revient sur scène rejoindre ses collègues pour jouer « Harmaggedon », une des premières compos du groupe, réarrangée pour l’occasion car à l’époque il n’y avait pas trois cordes dans Apocalyptica, mais quatre. Autre extrait de Shadowmaker, c’est au tour de la très électro « Riot Lights », qui nous plonge dans un univers tout en pixel, détonnant avec le reste de la setlist. Avec l’homme en petits carrés qui courre sur l’écran, on se rend compte que les animations sont complètement calées sur la musique. Un énorme travail qui ne laisse place à aucun écart rythmique. C’est couillu, mais l’effet est là, et on se retrouve avec un vrai spectacle son et lumière. Avant d’interpréter « Shadowmaker », Franky revient sur scène et nous explique qu’il est lui aussi un grand fan du groupe, et que c’était un immense honneur d’enregistrer cet album avec eux. Son interprétation est sur le point de me réconcilier avec lui lorsqu’arrive la partie instrumentale : le type cherche désespérément à justifier sa présence sur scène et commence à faire le pitre. C’était presque drôle, jusqu’au moment où il s’est mis à faire semblant d’uriner sur l’écran. Vingt secondes à occuper, et c’est tout ce qui lui est passé par la tête, alors que les cocos à côté se démènent avec le plus grand sérieux. Il aurait pu retourner vite fait en coulisse, boire un coup, laisser la vedette aux autres, mais non. Ce moment où Franky Perez a définitivement reçu l’award du gros con à mes yeux.
Je ne reviendrai pas sur le chiantissime « Hole In My Soul » (à ceux qui ont sorti leur briquet, sachez-le, vous étiez deux), et on passe direct à la reprise de « Refuse/Resist » de Sepultura. Pour la première et dernière fois de toute la soirée, la fosse s’est mise à pogotter ! A la fin de la chanson, Perttu s’empare du micro pour présenter tout le monde, ainsi que les différents instruments. Avec beaucoup d’humour, Paavo nous a offert une roue assez bancale, et Mikko a tenté une horrible roulade, qu’il a finie en déchirant sa chemise. Perttu annonce alors qu’ils vont interpréter « quelque chose pour laquelle [ils sont] vraiment désolés », et les voilà qui se lancent dans l’interprétation de leur reprise du thème du jeu vidéo Angry Birds. Ni d’une, ni de deux, tout le monde se met à danser, surtout un de leur roadies, que j’entre-aperçois se déchaîner totalement dans les backlines. Là, mesdames et messieurs, ça a été la fin de tout. Pendant « Seek & Destroy », Eicca est monté sur le pratos batterie taper sur les cymbales, pendant que Perttu s’est vautré en essayant de s’assoir sur les amplis retour avant de jouer allongé sur le dos. A la fin, Eicca prend le micro et annonce qu’ils vont nous « faire chier avec du classique » pour la dernière, à savoir la très connue « Hall of The Mountain King ». Leur interprétation s’arrête brutalement après quelques secondes, et Perttu se met à jouer « La Marseillaise », pour le plus grand bonheur du public qui l’entonnera en cœur tout du long, la scène étant éclairée en bleu/blanc/rouge pour l’occaz’. Fini les conneries, on reprend les choses sérieuses, et on revient à « Hall Of The Mountain King » après laquelle les quatre Finlandais sortiront de scène sous les acclamations du public. Evidemment, ce n’était pas la dernière, et les Apocalyptica clôtureront la soirée en interprétant « One », « I Don’t Care » et « Dead Man’s Eyes ».
C’est donc sur une standing ovation que le groupe achève ce Shadowmaker Tour et reprend la route d’Helsinki, pour deux semaines de repos bien méritées avant de repartir pour une tournée nationale. Merci beaucoup à NOUS PRODUCTIONS pour cette soirée qui n’aura pas souffert de ses quelques petits défauts.
Texte : Charlotte Sert
Photos : Mario Ivanovic
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